Malgré les 1,1 million de signalements reçus depuis le début de l’année 2019 concernant des comptes détenus par des utilisateurs de moins de 13 ans, Meta n’en aurait « désactivé qu’une fraction », selon la plainte des procureurs généraux de trente-trois Etats américains à l’encontre de l’entreprise, consultée par le New York Times. Bien qu’elle date d’octobre, les détails de cette plainte déposée auprès d’un tribunal californien, qui accuse les applications Facebook et Instagram de nuire à la « santé mentale et physique de la jeunesse », n’ont pas tous été immédiatement rendus publics, les plaignants préférant en dévoiler progressivement les différents aspects.
Selon ces derniers, « au sein de l’entreprise, le fait que des millions d’utilisateurs d’Instagram ont moins de 13 ans est un secret de polichinelle, documenté à de nombreuses reprises, dûment analysé et confirmé ». Parmi les extraits de courriels, de conversations et de présentations dévoilés mercredi 22 novembre, les procureurs généraux des Etats s’appuient notamment, pour démontrer que Meta a connaissance de l’existence de tels comptes, sur un graphique sur lequel apparaît le pourcentage d’internautes de 11 ou 12 ans utilisant Instagram tous les jours.
Les Etats reprochent aussi à la modération du réseau social d’avoir « automatiquement » ignoré les signalements concernant des comptes opérés par des mineurs de moins de 13 ans si ceux-ci ne contenaient ni photos ni biographie qui auraient permis d’établir avec certitude leur âge. Selon les Etats plaignants, ces documents font mentir les témoignages des cadres de Meta qui, devant le Congrès américain, s’étaient dits confiants en l’efficacité de leur système de vérification d’âge, assurant que les comptes d’utilisateurs de moins de 13 ans étaient systématiquement supprimés.
Dans un communiqué transmis dimanche au New York Times, Meta affirme travailler depuis dix ans à rendre plus sûre la navigation en ligne, en particulier pour les adolescents. Selon l’entreprise, la plainte des Etats « présente notre travail sous un jour négatif, en s’appuyant sur des citations tronquées et une sélection biaisée de documents ». L’entreprise explique également qu’il serait, selon elle, plus logique que la loi américaine oblige les boutiques d’application à obtenir l’autorisation des parents pour les jeunes de moins de 16 ans, plutôt que laisser à chaque application la responsabilité de faire cette vérification.
Les Etats américains plaignants s’étaient mobilisés à l’automne 2021 après la publication de documents montrant que Meta disposait de données accréditant l’idée qu’Instagram crée des problèmes de dépendance chez les jeunes et a un impact sur l’image et l’estime de soi. Une ex-employée de Facebook, l’ingénieure Frances Haugen, avait lancé l’alerte sur les pratiques de son ancienne entreprise, faisant fuiter plus de 20 000 pages de documents internes.