Meta, la maison mère de Facebook et Instagram, a annoncé, mardi 27 septembre, avoir démantelé deux réseaux de désinformation instrumentalisant ses plates-formes. Le premier, mené de Russie, servait à propager de fausses informations sur la guerre en Ukraine. Le deuxième réseau, de plus faible ampleur et dirigé de Chine, ciblait les citoyens Américains à l’approche des élections de mi-mandat.
L’opération russe a débuté en mai. Elle visait principalement l’Allemagne et, dans une moindre mesure, la France, l’Italie, l’Ukraine et le Royaume-Uni, a expliqué David Agranovich, un responsable de la sécurité chez Meta, lors d’un point-presse avec des journalistes.
Une opération « complexe »
Au centre de l’opération figuraient environ soixante sites Internet, peut-on lire dans le rapport mis en ligne par Meta. Ces sites imitaient trait pour trait ceux de médias reconnus, dont les journaux allemands Der Spiegel et Bild, le quotidien britannique The Guardian ou l’agence italienne ANSA. Le réseau russe y postait des articles critiquant l’Ukraine et les réfugiés ukrainiens, ou soutenant la Russie, avant de les partager sur YouTube, Facebook, Instagram, Telegram, Twitter ou des sites de pétitions en ligne. Mais des journalistes d’investigation du média allemand T-Online ont commencé à la fin du mois d’août à mettre en doute l’authenticité de ces sites, poussant Meta à ouvrir sa propre enquête.
« Il s’agit probablement de l’opération d’origine russe la plus importante et la plus complexe que nous ayons interrompue depuis le début de la guerre en Ukraine », avec « une combinaison vraiment inhabituelle de sophistication et de force brute », selon M. Agranovich. D’un côté, l’imitation de sites existants, dans plusieurs langues, a nécessité un « investissement technique et linguistique important », a-t-il relevé. De l’autre, la propagation des articles sur les réseaux sociaux s’est principalement faite par l’achat de publicités ou de faux comptes peu aboutis, souvent détectés automatiquement par les systèmes d’alerte de Meta.
Meta a généré un peu plus de 100 000 dollars de revenus à partir de ces publicités, selon l’agence Bloomberg. Cet argent servira à financer ses équipes de sécurité, assure l’entreprise. Au total, la société californienne dit avoir bloqué 1 633 comptes, 703 pages et un groupe sur Facebook ainsi que 29 comptes sur Instagram.
Les analystes de Facebook n’ont pas été en mesure de relier directement le réseau de désinformation au gouvernement russe. Mais, comme le souligne David Agranovich, un certain nombre de pages officielles d’ambassades russes en Europe et en Asie « ont amplifié » la diffusion de ces fausses informations. Un comportement dans la droite ligne de ce qui a été observé dès les premières semaines du conflit.
Un réseau chinois de plus faible ampleur
Le deuxième réseau repéré par Meta, beaucoup plus petit et dirigé, pour sa part, de Chine – sans que les chercheurs puissent le relier directement au gouvernement chinois –, a tenté plusieurs opérations, dont deux ciblant les citoyens américains.
Dans la première, de faux comptes se sont fait passer pour des conservateurs et abordaient des sujets comme les armes à feu ou l’avortement, ou encore critiquaient Joe Biden. Les messages étaient principalement en anglais mais aussi parfois en chinois ou en français. Dans une autre opération, de soi-disant progressistes critiquaient les positions du Parti républicain sur les armes à feu ou l’avortement, ou visaient personnellement des politiques républicains.
Au total, concernant ce deuxième réseau, Meta a bloqué 81 comptes, 8 pages et un groupe sur Facebook ainsi que deux comptes Instagram. L’approche était relativement artisanale et n’a a priori pas eu de grand impact. C’est néanmoins la première fois qu’une opération de désinformation se focalise à la fois sur des démocrates et des républicains en soulevant des sujets polémiques à l’approche des élections législatives de mi-novembre, relève Meta. « Même si l’opération n’a pas fonctionné, elle est importante car elle représente une nouvelle direction » pour les tentatives de désinformation d’origine chinoise, estime ainsi Ben Nimmo, responsable de la lutte contre la désinformation chez Meta.
Le même réseau basé en Chine a aussi ciblé les internautes tchèques avec des informations critiquant le soutien de leur gouvernement à l’Ukraine et sa politique envers la Chine, et a plus généralement tenté de propager des informations sur des problématiques géopolitiques critiquant les Etats-Unis.