Neutralité du net : la Commission européenne veut revoir les règles de financement des infrastructures télécom

Neutralité du net : la Commission européenne veut revoir les règles de financement des infrastructures télécom


Le financement des infrastructures internet est le prochain sujet sur lequel la Commission européenne entend se pencher. A peine sortie du dossier DSA/DMA, la commission a indiqué la semaine dernière son intention de revenir sur la question du financement des infrastructures télécom, notamment en demandant aux acteurs proposant des services en ligne de soutenir les efforts déjà consentis par les opérateurs.

Une règlementation « à bout de souffle »

Auprès des Echos, le commissaire européen Thierry Breton a ainsi déclaré que « les règles en place depuis 20 ans arrivent à bout de souffle et [que] les opérateurs n’ont aujourd’hui plus le juste retour sur leurs investissements ».

Précisant au passage qu’un projet législatif sur le sujet devrait voir le jour à la fin de l’année 2022. « Une poignée d’acteurs occupent à eux seuls plus de 50 % de la bande passante mondiale. Il est temps désormais de réorganiser la juste rémunération des réseaux », indiquait le commissaire européen au marché unique dans un tweet la semaine dernière. La commissaire à la concurrence, Margrethe Vestager, avait précédemment évoqué cette piste de travail lors d’un briefing donné le lundi 2 mai.

Cette mesure était demandée avec insistance par les fournisseurs d’accès à internet : en novembre 2021, plusieurs opérateurs avaient ainsi fait savoir qu’ils planchaient sur un « code de bonne conduite » à l’intention des grands opérateurs américains de streaming (Netflix, YouTube, Akamai et Facebook) afin de les inciter à limiter leur consommation de bande passante. Selon Les Echos, les opérateurs envisagent également de profiter de la présidence française de l’Union européenne pour mettre en avant le sujet. Auparavant, les opérateurs européens avaient déjà plaidé pour un allégement des règles en matière de neutralité du net, cette fois en mettant dans la balance le risque pour les investissements en matière de 5G.

Le poids du streaming

Suite aux prises de position de Thierry Breton et de Margrethe Vestager, l’European Telecommunications Network Operators’ Association, le lobby européen des opérateurs télécoms, a publié une étude mettant en lumière la hausse croissante des coûts d’infrastructure supportés par les opérateurs. Ceux-ci sont évalués entre 36 et 40 milliards d’euros sur l’année 2021. Une hausse des coûts justifiés selon les auteurs du rapport par les volumes croissants de bande passante nécessaires pour acheminer le trafic provenant des acteurs américains.

Le rapport vient également souligner que six acteurs (Google, Facebook, Netflix, Apple, Amazon et Microsoft) représentent à eux seuls plus de 56 % du trafic sur les réseaux internet fixes et mobiles.

L’une des solutions évoquées par le rapport serait la mise en place d’une participation financière des plateformes les plus importantes, afin d’alléger les investissements des opérateurs sans venir peser sur le fonctionnement et la capacité d’innovation des petits acteurs. Une approche similaire à celle mise en place dans le cadre du DMA et du DSA, deux textes qui préconisent une approche spécifique pour les acteurs les plus importants.

La neutralité du net menacée ?

Mais outre la difficulté de le faire accepter aux géants américains du numérique, le projet de la Commission européenne suscite des inquiétudes quant au principe de neutralité du net. Ce principe voté par le Parlement européen en 2015 entend garantir que « les fournisseurs de services internet devraient traiter tous les contenus en ligne, les sites et les plateformes de la même manière ».

En impliquant des acteurs américains dans le financement des infrastructures réseau, les défenseurs de la neutralité du net craignent que les acteurs concernés n’en profitent pour exiger un accès privilégié, ou exploitent cette position pour écraser la concurrence.

La Commission européenne se défend néanmoins de vouloir remettre en question le principe de neutralité du net.





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