Cela fait de nombreuses années que les utilisateurs de Linux expriment une certaine aversion envers Nvidia, le leader mondial des processeurs graphiques. La raison ? Alors que toutes les autres sociétés avaient ouvert le code source de leurs pilotes, NVIDIA s’y est obstinément opposé. Qui plus est, l’entreprise n’a pas fourni aux développeurs du noyau Linux les informations nécessaires pour créer des pilotes open source. Ces derniers ont dû se contenter de pilotes propriétaires de qualité inférieure.
Aujourd’hui, Nvidia a finalement franchi le pas et ouvert le code de son pilote GPU.
Le mot « haine » n’était pas exagéré. Lors d’une célèbre interview, Linus Torvalds, le créateur du noyau Linux, visiblement frustré, avait déclaré publiquement que Nvidia avait été « l’un des pires points noirs que nous ayons eus avec les fabricants de matériel […] Nvidia a été la pire entreprise avec laquelle nous ayons jamais eu affaire. Alors Nvidia, va te faire foutre. »
Et, pour ne pas oublier la situation, en 2022, le gang de ransomware Lapsus $ avait même menacé de divulguer les fichiers GPU si l’entreprise refusait « d’ouvrir entièrement le code source et de distribuer ses pilotes GPU pour Windows, macOS et Linux, à partir de maintenant et pour toujours ». Une demande de ransomware plutôt inhabituelle.
La transition est engagée
Cela n’a évidemment pas fonctionné sur l’instant, mais Nvidia est maintenant en train de passer aux modules open source alors qu’elle se rapproche d’une capitalisation boursière de trois mille milliards de dollars. Cela marque un changement majeur dans sa politique de longue date.
Cette transition a commencé en mai 2022 avec la sortie du pilote R515, qui comprenait un ensemble de modules GPU Linux en open source avec une double licence GPL et MIT.
Au cours des deux dernières années, Nvidia a travaillé sans relâche pour améliorer ces modules open source, en obtenant des performances applicatives équivalentes ou supérieures à celles de leurs homologues à source fermée. La société a également ajouté de nouvelles fonctionnalités importantes, notamment :
- Prise en charge de la gestion de la mémoire hétérogène (HMM)
- Prise en charge des architectures de mémoire Nvidia Grace
Ces fonctionnalités n’aideront pas à obtenir de meilleures performances de jeu, mais elles pourraient aider les mineurs de cryptomonnaie ou les développeurs d’intelligence artificielle (IA).
Avec la sortie prochaine du pilote R560, Nvidia va achever sa transition vers des modules de noyau GPU open source. Cette évolution devrait bénéficier à la communauté Linux en offrant une meilleure intégration avec le système d’exploitation et en permettant un développement et un support plus robustes.
Tous les GPU Nvidia ne sont pas concernés
Il est toutefois important de préciser que cette transition vers l’open source ne concerne pas l’ensemble des GPU NVIDIA. En effet, les modules open source sont désormais obligatoires pour les plateformes de pointe comme NVIDIA Grace Hopper ou NVIDIA Blackwell. Pour les GPU basés sur les architectures Turing, Ampere, Ada Lovelace ou Hopper, NVIDIA recommande également de passer aux modules open source. En revanche, les anciens GPU reposant sur les architectures Maxwell, Pascal ou Volta resteront sous pilotes propriétaires, car ils ne sont pas compatibles avec les nouveaux modules open source.
Vous cherchez à identifier les composants de votre ordinateur ? Nvidia propose un script, nommé nvidia-driver-assistant, pour vous assister dans cette tâche. Une fois cette étape franchie, vous pouvez installer le CUDA Toolkit et les pilotes GPU appropriés en utilisant le gestionnaire de paquets de votre distribution Linux.
Un premier pas encourageant, mais…
Cette initiative marque un pas significatif vers la création d’un écosystème plus ouvert pour les utilisateurs et les développeurs Linux. Elle place également Nvidia dans une position plus compétitive face à AMD, qui s’est depuis longtemps distingué par son approche favorable à l’open source dans l’univers Linux.
Bien qu’il s’agisse d’une avancée significative, il est important de souligner que la transition de NVIDIA vers l’open source se limite pour l’instant aux modules du noyau. Les composants de l’espace utilisateur du pilote restent propriétaires, ce qui signifie que l’intégration open source complète, notamment pour les applications de jeu, n’est peut-être pas encore imminente.
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