Mercredi 21 février au soir, tout le monde attendait Jensen Huang, le PDG de Nvidia, comme le prophète des temps nouveaux. Surtout les financiers de Wall Street, de plus en plus nerveux au fur et à mesure que la Bourse pulvérise ses records historiques. Avec une seule question pour l’oracle : l’intelligence artificielle est-elle une « bulle » de plus dans le ciel de la technologie, ou une réalité tangible porteuse d’une nouvelle ère de croissance et d’innovation ? Les résultats financiers de Nvidia ont rassuré les anxieux.
Entre février et avril 2023, soit le premier trimestre de son année fiscale, la société a enregistré un chiffre d’affaires d’un peu plus de 7 milliards de dollars (6,4 milliards d’euros), soit 30 % de mieux qu’un an auparavant.
Mais sur le dernier trimestre de ce même exercice, les ventes se sont montées à plus de 22 milliards de dollars, trois fois plus en moins d’un an. Et ce n’est pas fini, puisque le PDG prévoit un chiffre d’affaires de 24 milliards pour le trimestre en cours. Les profits ont suivi la même pente. La firme engrange désormais plus de 12 milliards de dollars de bénéfice chaque trimestre.
Bourses enthousiastes
Il n’en fallait pas plus pour soulever l’enthousiasme des Bourses mondiales. Même celle de Tokyo, la première à ouvrir, jeudi 22 février, a applaudi la performance, qui signifiera plus de ventes de machines japonaises pour fabriquer toutes ces puces électroniques.
L’Américano-Taïwanais Jensen Huang, qui a créé Nvidia en 1993 pour concevoir des cartes graphiques destinées aux jeux vidéo, le reconnaît : il n’arrive plus à fournir la demande. « Elle vient de partout dans le monde, des entreprises, des secteurs industriels, des pays », affirme-t-il. Les centres de données en ont besoin pour faire tourner Internet, les laboratoires pharmaceutiques pour concevoir de nouvelles molécules, les constructeurs automobiles pour leurs voitures autonomes.
Comme à chaque fois qu’un quasi-monopole se fait jour, tous les clients rêvent de s’en affranchir en produisant leurs propres semi-conducteurs. Google, Meta, Microsoft, Amazon et même Tesla ont annoncé des projets dans ce sens. Open AI, la star à l’origine de cet engouement avec son logiciel ChatGPT, tente de monter un tour de table de près de 7 milliards de dollars pour concevoir ses propres matériels.
M. Huang regarde cette agitation avec philosophie. Le marché est tellement vaste. Il le chiffre à 1 000 milliards de dollars d’investissement par an. La concurrence la plus sérieuse viendra des historiques, comme Intel, AMD ou Samsung. D’ici à 2026, il n’a pas grand-chose à craindre. Après, ce sera une autre histoire.