Un univers classique, la côte californienne contemporaine, avec une différence notable : pas d’humains, mais des dinosaures anthropomorphes. Ceux qui nous intéressent sont des lycéens dans leur dernière année. Ils sont naturellement confrontés au vertige des choix de vie propres à l’adolescence, mais, surtout, à la menace d’un astéroïde, qu’on ne voit jamais mais qui risque bien de s’abattre sur la planète.
Remarqué depuis sa présentation en 2020 lors d’une conférence de Sony, le sous-texte de Goodbye Volcano High (sorti le 29 août sur PC et PlayStation) ne faisait pas grand mystère. Après Don’t Look Up. Déni cosmique, d’Adam McKay, difficile de ne pas deviner une parabole de la crise climatique et d’une jeune génération, première concernée, prompte à l’écoanxiété. Cependant, contrairement au film de 2021, on comprend assez vite qu’il n’y a pas grand-chose à faire, qu’il n’y aura pas d’héroïsme. Restent les espoirs d’un évitement de dernière minute et la nécessité de plus en plus pressante de faire la paix avec l’idée d’une fin prématurée.
Dino future
Goodbye Volcano High relève de l’aventure narrative à la limite de la série interactive. Le joueur suit Fang, qui entre en terminale, leader de son groupe de rock formé avec deux amis d’enfance. On sera fréquemment invité à choisir ses répliques, ce qui affecte les rapports avec ses camarades de classe, dans le bon ou le mauvais sens.
De temps en temps, pour accompagner la formidable bande originale rock, des séquences musicales mettront à l’épreuve notre sens du rythme. Bien que ces mini-jeux représentent une sorte de tarte à la crème dans ce genre de titres (dans Night in the Woods, par exemple, ils n’étaient pas mémorables), force est de reconnaître que ceux de Goodbye Volcano High sont particulièrement équilibrés et amusants.
Le jeu brille également par sa réalisation somptueuse. Les dinosaures, pour lesquels il est difficile de ne pas ressentir de l’empathie, sont délicieusement animés, affublés de grands yeux expressifs et servis par un doublage en anglais impeccable. Les francophones ne sont pas en reste tant la localisation se révèle soignée : dans les sous-titres, mèmes et jeux de mots sont adaptés avec finesse.
La fin du monde justifie les moyens
Durant les sept heures du scénario, il est bien difficile de rester impassible devant cette poignée de destins potentiellement brisés. Le terme du lycée, de l’enfance, thème qu’on peut voir dans d’autres titres comme Life is Strange, représente déjà une forme de fin de cycle évident, mais la menace implacable de l’apocalypse, telle une loupe grossissante, rend les enjeux douloureusement concrets.
Doit-on répondre à cet inconnu paniqué par l’échéance, qui décide un soir de confier ses sentiments par SMS ? Doit-on essayer de se rabibocher in extremis avec des parents insensibles aux questionnements de genre de leur enfant ? Doit-on pousser sa meilleure amie à continuer de jouer dans le groupe de rock, alors qu’elle veut arrêter sans oser l’avouer ? Comment calmer la fureur de sa camarade, incapable de gérer émotionnellement l’injustice de voir ses rêves soudainement compromis par un gros rocher venu du ciel ?
En lançant ses personnages si innocents dans une situation si cruelle, Goodbye Volcano High les incite à se questionner, bien sûr, mais nous sonde aussi et nous fait inéluctablement réfléchir à nos propres motivations et priorités. Ces dinosaures sont beaux dans le crépuscule. Et ils cherchent à rappeler que l’astéroïde, le nôtre, demeure évitable.
L’avis de Pixels
On a aimé :
- l’aspect relativement irréprochable de la direction artistique et de la réalisation ;
- des dialogues très justes, extrêmement actuels, et une adaptation en français de première classe ;
- le fait que même les séquences rythmiques sont soignées.
On a moins aimé :
- pleurer, un peu, à la fin, comme tout le monde.
C’est plutôt pour vous si…
- vous êtes à l’aise à l’idée de mettre un peu de Melancholia dans votre Dawson.
Ce n’est plutôt pas pour vous si…
- vous n’êtes pas adepte de la passivité induite par ce genre d’aventure narrative.
La note de Pixels :
La majorité, 18 ans sur 20