Il sera bientôt là. Ou en tout cas… dans deux ans maximum. Onze ans après la sortie de Grand Theft Auto V (GTA V), l’un des jeux les plus populaires au monde, le studio américain Rockstar Games a diffusé les premières images officielles de GTA VI, dont on découvre qu’il sortira en 2025.
Sur fond de Tom Petty (Love Is a Long Road, 1989), on y découvre surtout Lucia, jeune braqueuse latino qui devrait être la première protagoniste féminine d’un des épisodes majeurs de la série, ainsi que son compagnon. On y retrouve enfin la ville de fiction de Vice City, décalque grinçant de Miami, déjà parcouru dans le bien nommé GTA : Vice City. Sauf que si cet épisode sorti en 2002 se déroulait dans les années 1980, GTA VI semble bien ancré dans le présent, caricaturant à l’envi le format des stories Instagram et des lives TikTok pour mieux mettre en scène le genre de situations absurdes ou violentes qui collent à la peau de la Floride, souvent considérée comme la capitale américaine du fait divers grotesque.
Cette première bande-annonce de tout juste quatre-vingt-dix secondes, qui devait sortir mardi 5 décembre à 15 heures, a fuité quelques heures plus tôt, au point de convaincre Rockstar Games de finalement la diffuser dans la nuit de lundi à mardi. Elle donne le programme pour ce blockbuster, qui n’avait jusque-là été confirmé que du bout des lèvres. Malgré le goût prononcé de Rockstar Games pour le secret, la surprise n’est pas totale : Vice City avait déjà été aperçue sur des images volées qui ont circulé il y a un an.
Nouveau décor, nouvelle tête, mais même règles. GTA VI est le nouveau volet d’une série de jeux vidéo née en 1997, dont le principe est d’incarner un ou plusieurs délinquants. Le joueur y jouit d’une grande liberté, lui permettant de multiplier les méfaits et d’explorer des cités gangrenées par le crime, sans rien sacrifier d’une ambition narrative peu commune. Les polémiques accompagnant chaque sortie ont d’ailleurs largement contribué à faire connaître la série – y compris lorsque des politiques l’ont critiqué ou interdit dans certains pays.
Un gangster au casier bien rempli
Les espérances pour GTA VI sont à la hauteur de la qualité des précédentes productions de Rockstar Games. Un gage de confiance a été accordé à la série à partir du premier épisode réalisé en trois dimensions, GTA III (2001). Sa narration inspirée des films de gangsters et son univers urbain très immersif ont propulsé la licence transgressive au rang d’icône de la culture populaire.
« Grand Theft Auto est un maître étalon du jeu vidéo, chaque sortie a imposé un nouveau standard de l’industrie. Rockstar a connu une montée en puissance sur l’écriture entre San Andreas [2004] et GTA IV [2008]. Puis [la popularité du jeu a] explosé avec leur mode multijoueur sur GTA V », observe Olivier Mauco, fondateur du studio Game in Society, auteur de GTA IV. L’envers du rêve américain (éditions Questions théoriques, 2013) et professeur à Sciences Po Paris.
En effet, le mode GTA Online est devenu un atout majeur pour le dernier épisode, à la longévité inédite. Des centaines de milliers d’adeptes s’y adonnent au role play (« jeu de rôle »), qui applique au jeu en ligne des ingrédients du théâtre d’improvisation. Ainsi, GTA V reste l’un des jeux les plus regardés en streaming et les plus joués sur console et sur PC. En 2022, il figurait toujours dans le classement des jeux les plus achetés en France.
Après la déflagration GTA V, Rockstar Games a affirmé son ambition artistique avec Red Dead Redemption 2 (2018), sorte de GTA au Far West et l’un des jeux les plus ambitieux de ces cinq dernières années. Jusqu’à l’excès ? La sortie se voit en tout cas entachée par des critiques sur les conditions de travail au sein du studio. Quelques jours avant la publication du jeu, des employés dénoncent une culture du secret oppressante et des charges de travail déraisonnables pour élaborer cet univers immense et fourmillant de détails jusque-là inédits. Quelques mois plus tard, Dan Houser, le cofondateur de Rockstar Games, considéré comme l’un des « réalisateurs » des jeux du studio depuis vingt ans, se mettait en retrait, avant de finalement quitter l’entreprise l’année suivante.
Braquage des ventes
En outre, pour s’assurer un retour gagnant, GTA devra faire mieux que de proposer une version plus étendue et visuellement réussie que le cinquième opus : il lui faudra éviter la redite et se mesurer aux univers les plus innovants sortis depuis, comme Elden Ring (2022), Cyberpunk 2077 (2020) ou The Legend of Zelda : Breath of the Wild (2017).
Olivier Mauco compte sur le talent des scénaristes du studio, qui ont su jusque-là mettre en lumière les crispations des sociétés occidentales : « Ce ne sont pas des jeux décérébrés, c’est ça le gros paradoxe. C’est très fun, très marrant et, en même temps, il y a une vraie critique sur le monde moderne. »
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L’industrie du jeu vidéo, quant à elle, voit dans GTA VI un futur champion des ventes : il n’a fallu qu’une semaine à GTA IV et seulement trois jours à GTA V pour franchir le milliard de dollars (900 millions d’euros) de recettes. A titre de comparaison, le film qui a connu le plus grand succès au box-office en 2023, Barbie, a généré 1,4 milliard de dollars en un peu plus de quatre mois.
GTA V s’est écoulé à 190 millions d’exemplaires, selon les derniers chiffres de son éditeur, Take-Two. Ce qui en fait le deuxième jeu vidéo le plus vendu au monde, derrière Minecraft et ses plus de 300 millions d’exemplaires écoulés.