Si la mémoire flash a bel et bien remplacé les disques à plateaux dans les ordinateurs personnels, ces derniers ont plus que jamais leur raison d’être dans les centres de données et autres serveurs. Des lieux où leur vitesse et leur temps d’accès est suffisant, et leur rapport stockage/prix imbattable. Au moins encore pour un temps…
Ils sont devenus invisibles : ni votre ordinateur desktop acheté à Noël, ni votre tablette, ni votre smartphone n’embarquent un disque dur traditionnel à plateau. Seuls les disques externes et autres NAS personnels dédiés à la sauvegarde personnelle ou professionnelle sont encore d’actualité, avec quelques exceptions pour ceux qui montent des machines et qui aiment encore avoir un « bon gros HDD » dans leur tour (HDD = hard disk drive, l’acronyme anglais de disque dur). Pourtant, selon le responsable de la division stockage de Toshiba Europe, Rainer Kaese, les disques durs sont loin d’être morts. Ils sont même toujours incontournables. « Il s’est vendu 258,9 millions de HDD l’an dernier (en 2022, ndr). Leur capacité totale s’élève à 1,338 zettaoctets, une augmentation de quasiment un tiers par rapport à 2020. Jamais les HDD n’ont représenté une telle capacité de stockage conjuguée », a écrit Rainer Kaese dans un billet publié dans Global Security Mag. Une lecture de volume de stockage qui est un peu différente de celle du volume des unités vendues.
Plus de volume de stockage, volumes stables
Si on lit les statistiques de ventes de disques durs, passé le pic de 2010 à 650 millions d’unités, le marché fut en baisse constante jusqu’à 2020. Depuis, le volume des disques reste stable à environ 260 millions d’unités par an. Entre temps, le marché de ces supports désormais très gros et lents comparés à la mémoire flash s’est transformé. Mis à part quelques rares références encore destinées au grand public, les disques durs ont été évincés des différents formats informatiques grand public. Après avoir disparu des baladeurs (rappelez-vous les premiers iPod et autres Archos !), ils ont fini par être boutés hors des PC portables et des tours. D’abord dans les configurations haut de gamme, et désormais dans toutes les machines d’entrée de gamme. La mémoire flash disposant de modules et de capacités économiques (configurations en 64 Go d’eMMC par exemple). Ce qui sauve les disques durs de la mise au rebut, c’est une adéquation idéale entre encombrement, prix, vitesse de lecture/écriture et capacité de stockage. Avec un marché récurrent avide de ces arguments : les centres de données.
Moins chers que la mémoire flash, plus rapide que la bande
Les disques durs au format 3,5 pouces tournant à 7200 tours par minute ont un premier atout de poids : ils peuvent stocker beaucoup de données. De nombreuses références dépassent les 10 To et on voit même arriver des capacités supérieures à 20 To. L’espace et la consommation énergétiques étant ce qui coûte le plus cher aux centres de données, le fait que les constructeurs arrivent à continuer de tasser toujours plus de données dans les HDD classiques les rend toujours plus attractifs. Les disques SSD, bien plus rapides, n’atteignant pas ce niveau de densité à des tarifs acceptables pour le développement du stockage de masse que représente la généralisation du cloud et de la collecte de masses de données.
Et par rapport au stockage sur bandes magnétiques, elles aussi des « dinosaures » du stockage, le disque dur est bien plus rapide. Si la bande est un stockage de choix dans des archives hors lignes, de longue durée, etc. Son mode de fonctionnement passant par l’attente du chargement des cassettes dans un lecteur de bande la rend peu pratique pour stocker des données auxquelles on est susceptible d’accéder fréquemment. Ce qui fait que les HDD ont encore un bel avenir à la fois dans les datacenters et les NAS, mais aussi les systèmes de vidéosurveillance, de plus en plus répandus dans de très nombreux pays.
Une disparition inéluctable à long terme ?
Passé au tamis du cerveau de nos confrères de Blocks and Files qui font l’écho du billet de Toshiba, si le futur proche et moyen terme des disques durs « classiques » est assuré, sur le long terme leur survie est peut-être moins certaine. La raison étant que les concepteurs de mémoire flash ne cessent de jouer sur le nombre de couches de leurs modules de mémoire NAND (l’autre nom de la flash) pour atteindre aujourd’hui jusqu’à 176 couches. Si pour l’heure le rapport capacité/prix est en leur défaveur, cette technologie n’a cessé de voir ses pris baisser.
Lire aussi : Le futur du stockage de masse s’écrit sur des bandes magnétiques 20 fois plus fines que vos cheveux (janvier 2022)
De plus, avec des volumes et capacités de vente en hausse constante depuis plus d’une décennie, les investissements en r&d ainsi que la capacité à attirer les talents des champions de la flash leur permet de s’améliorer à un rythme plus rapide que dans le monde des HDD. Un point de vue partagé par les professionnels du stockage sur bande comme ceux d’IBM que nous avons rencontrés. Des chercheurs et ingénieurs qui vantent non seulement la sécurité ou la durée de vie des bandes – plusieurs décennies contre entre trois et sept ans pour un disque dur – mais aussi leur capacité de stockage en progression bien plus rapide. Affichant déjà 18 To par cartouches – et 45 To en format compressé ! – les cassettes pourraient monter à 580 To d’ici à une décennie. Une progression que les disques durs ne pourront pas assurer.
Coincés entre la mémoire flash et les bandes magnétiques, les disques durs continuent de vivre leur vie grâce aux centres de données. Mais pourraient, à moins d’un sursaut technologie majeur, finir par être évincés à moyen ou long terme de notre monde numérique.
Source :
Blocks and Files