Renforcer le droit à l’image des enfants et leur vie privée face à certains parents qui les surexposent sur les réseaux sociaux ? Etienne, 19 ans, est convaincu de la « nécessité » de la proposition de loi, examinée au Sénat le 10 mai après une adoption en mars à l’Assemblée nationale, et qui entend introduire dans le code civil, la notion de « vie privée » de l’enfant dans la définition de l’autorité parentale. « Il y a beaucoup de parents qui affichent leurs enfants sur TikTok. Ils ne pensent pas forcément à mal mais on oublie le caractère public de ces vidéos et le fait qu’on peut se retrouver en trend [en tendance] sans rien avoir demandé. »
Pourtant, en ce qui le concerne, cet étudiant du Mans « [s’]en fiche » que ses parents aient pu poster plusieurs photos de lui plus jeune et des clichés de famille sur Instagram, « mais heureusement que [c’est] sur un compte paramétré en privé et réservé aux amis et aux proches ». Appartenant aux premières générations nées avec les réseaux sociaux, Etienne et plusieurs autres adolescents et jeunes adultes – contactés à travers un appel à témoignages – se sont confiés au Monde sur la façon dont ils gèrent leur image en ligne.
« J’ai un peu peur du jugement des autres »
« Il faudrait toujours l’accord de l’enfant avant de poster », tranche Yamina, 15 ans. Cette lycéenne de la région Centre-Val de Loire se rappelle que, plus petite, « cela ne la dérangeait pas trop » que sa mère partage des photos d’elle sur son compte Facebook. Mais « vers la quatrième, [elle ] lui a demandé plusieurs fois de cacher [sa] tête parce qu’[elle] n’aimai[t] pas ou ne [se] trouvai[t] pas très belle ».
Si ces négociations intrafamiliales peuvent se faire sans trop de protestations, ça n’a pas toujours été le cas pour Eloïse, 16 ans, lycéenne des alentours de Lyon : « Il y a eu certaines fois où mes parents mettaient en photo de profil des clichés de moi petite, notamment en maillot de bain. (…) J’ai eu un peu de difficulté au départ à leur demander de les retirer. » Souvent, en guise de réponse, les yeux ronds des parents ne voyant pas ce qu’il y a de grave, quand leur progéniture, elle, veut faire valoir son droit à l’image.
Un paradoxe, lorsque l’on entend Eloïse raconter la prudence de ses parents au moment de l’autoriser à ouvrir des comptes Instagram, Snapchat et TikTok. « J’ai eu mon premier téléphone en 6e, mais j’ai dû attendre 13 ans [âge plancher sur la plupart des plates-formes] pour avoir le droit d’aller sur les réseaux sociaux. » Une autorisation qui ne s’est pas spécialement accompagnée d’avertissements ou de grands discours. « Mais on m’a assez rapidement, à l’école, prévenue que les réseaux sociaux, c’était pas très hypersécurisant et qu’il fallait faire attention », explique Eloïse.
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