La société de production Paramount Pictures a réalisé, mardi 3 octobre, un coup marketing sur TikTok en publiant gratuitement sur la plate-forme un de ses hits de 2004 : Mean Girls (Lolita malgré moi dans sa version française), de Mark Waters. Les utilisateurs pouvaient ainsi visionner gratuitement l’un des films les plus emblématiques de la carrière d’une icône des années 2000, Lindsay Lohan. Celui-ci avait été découpé, pour l’occasion, en 23 courtes vidéos.
Pourquoi ce film ? Emblématique de la culture web, Mean Girls – que l’on pourrait traduire par « les pestes » – est un réservoir à mèmes dans lequel les internautes aiment piocher pour invoquer la figure de la personne populaire mais insensible et superficielle. Pourquoi ce jour ? Parce que l’un des personnages fait allusion à cette date dans le long métrage, comme étant le « Mean Girls Day ». Le choix du format, enfin, s’inspire des centaines de comptes qui, sur la plate-forme, diffusent illégalement des reportages, des séries ou même des films – y compris Mean Girls. En août, NBC avait misé sur la même stratégie en diffusant en avant-première un épisode de sa comédie Killing It, rappelle The Guardian.
Car sur TikTok, les utilisateurs raffolent de ces œuvres découpées, pour respecter les standards de la plate-forme, en courtes vidéos. Des extraits de blockbusters, de comédies romantiques mais aussi d’émissions comme « C’est mon choix » peuvent atteindre des milliers de vues. Au point qu’il n’est pas rare de les voir remonter sur la page d’accueil (le fil « Pour toi ») de l’application. Certains utilisateurs laissent même à dessein le message « Je commente pour l’algorithme » sous un extrait, dans l’espoir de se voir proposer automatiquement la suite de la vidéo. Une pratique décrite dans Le Système TikTok, de la journaliste Océane Herrero (éditions du Rocher, 2023).
Remise à la mode de vieilles toiles
Ce découpage n’est cependant pas nouveau : dans les années 2000, avec la massification du piratage, de nombreux internautes téléchargeaient déjà des films par tronçons. Plus tard, les sites de partage de vidéo comme YouTube ont aussi vu fleurir des publications sauvages de films morcelés.
Sur TikTok, ces contenus sont de plus en plus nombreux, et remettent à la mode des films vieux de parfois plusieurs décennies, comme le souligne Radio Canada, ou donnent une popularité nouvelle à des tubes comme Dreams, de Fleetwood Mac (1977). Des séries ou des films du passé tels que Mean Girls, La Revanche d’une blonde (2001) ou la série Malcolm (2000-2006) sont ainsi plébiscités. La présence de ces contenus, pourtant protégés par le droit d’auteur, sont modérés, semble-t-il, avec un zèle inégal par la plate-forme, ce qui interroge aussi quant au niveau de tolérance des sociétés de production sur cette pratique.
On peut soupçonner les ayants droit de compter sur le fait que ces bouts de vidéo fassent l’effet d’une bande-annonce ou d’un teaser, et incitent les moins acharnés des internautes à visionner les films de façon plus classique, plus légale… et surtout plus confortable. Avec une efficacité qui reste à démontrer, mais qui illustre l’influence croissante de TikTok dans la façon qu’ont les internautes de consommer des contenus audiovisuels. Le film Mean Girls avait en tout cas disparu depuis du compte TikTok officiel @meangirls, désormais riche de 154 000 abonnements.