Tout comprendre à l’écosystème du simracing en 2025

Tout comprendre à l’écosystème du simracing en 2025


En janvier 2025, une nouvelle a fait grand bruit dans le Landerneau des passionnés de courses virtuelles. La Fédération Internationale de l’Automobile (FIA) a enfin reconnu le simracing en tant qu’esport, en l’intégrant pour la première fois dans son Code Sportif International.

Cette consécration institutionnelle souligne l’importance grandissante d’une pratique qui s’impose de plus en plus comme un véritable segment du sport automobile. Selon le cabinet d’études Valuates Reports, le marché mondial du matériel simracing était estimé à environ 1,3 milliard de dollars en 2024. D’ici 2031, il devrait dépasser les 5 milliards, avec une croissance annuelle moyenne d’environ 20%.

Cette dynamique reflète l’engouement des joueurs, amateurs comme professionnels, pour des équipements toujours plus performants. Le secteur repose notamment sur des marques pionnières présentes depuis plus de 30 ans, telles que le français Thrustmaster, le suisse Logitech ou encore l’allemand Fanatec.

Véritable nébuleuse économique, le simracing rassemble équipementiers, éditeurs de jeux, fabricants de consoles, médias spécialisés et surtout constructeurs automobiles. Tous cherchent à prendre la pole position dans un secteur encore de niche, certes, mais aux perspectives de croissance attirant de plus en plus d’investisseurs. Pour mieux comprendre cet écosystème, il faut remonter aux origines du simracing et observer comment cette discipline s’est d’abord façonnée dans l’univers du jeu vidéo, puis en tant que communautés.

Le simracing, des bornes d’arcades aux simulations sur PC

Dater au carbone 14, la naissance du simracing est un exercice délicat. Globalement, selon l’historiographie des joueurs, trois approches se confrontent. Après la Seconde Guerre mondiale, les fêtes foraines françaises voient l’essor des flippers et jeux d’arcade électro-mécaniques. Ces antiquités, comme la borne américaine Drive Mobile de 1941, utilisaient des mécanismes physiques, notamment un cylindre rotatif pour simuler la conduite.

Plus pragmatiquement, certains situent les origines du simracing entre les années 70 et 90, lors de la démocratisation des jeux vidéo. En 1976, Night Driver introduit la première vue subjective en 2D. En 1982, Namco frappe un grand coup avec Pole Position, le premier jeu à intégrer des tracés réels, une caméra arrière et surtout des concurrents virtuels.

 

© www.imdb.com

En 1992, Virtua Racing de Sega franchit un nouveau cap en proposant des graphismes 3D en temps réel, une caméra dynamique et une physique automobile plus avancée. Progressivement, cette pratique migre des salles d’arcade vers le domicile des joueurs, d’abord sur PC. En 1994, la sortie du Logitech WingMan Formula Force, un des premiers volants grand public à retour de force, marque une étape charnière, considérée par beaucoup comme le véritable départ du simracing moderne.

Logitech G - simracing reportage - premier volant de Logitech
Logitech WingMan Formula Force (1994) © ebay

Plus encore que ces querelles de clocher, les éditeurs commencent à clarifier leur position en différenciant progressivement simulation et arcade. Le point d’orgue de cette rupture est la sortie de Gran Turismo en 1997. Cette licence emblématique propulse alors le simracing grand public sur consoles avec un réalisme sans précédent.

La fédération de premières communautés de passionnés

À partir des années 2000, le simracing continue son essor, porté par la multiplication des licences. La série Gran Turismo reste un pilier incontournable, tandis que d’autres titres majeurs s’imposent progressivement. Parmi les plus connus, on compte rFactor (2005), Assetto Corsa (2014) ou encore la série des F1, qui prend le relais en 2009 de la licence Formula One de Sony.

 

C’est cependant à partir de 2008 que le plaisir solitaire du simracing se transforme en véritables communautés, avec l’arrivée d’iRacing. Cette plateforme en ligne démocratise le système d’abonnement mensuel. Plutôt que d’acheter un jeu, les utilisateurs souscrivent à un contenu de base, qu’ils complètent ensuite à la carte avec circuits et véhicules supplémentaires. Surtout, ils peuvent s’affronter lors de compétitions en ligne.

Toutefois, si beaucoup de passionnés considèrent iRacing comme une référence absolue, ce n’est bien évidemment pas pour son modèle économique. La plateforme couvre toutes les disciplines automobiles et innove avec un système de classement intégrant à la fois le niveau de pilotage et la sécurité en piste.

 

En 2025, iRacing revendique une communauté internationale d’environ 265 000 utilisateurs mensuels actifs. Si les communautés en ligne commencent à se structurer, une nouvelle révolution se prépare dans les paddock. Celle du matériel.

L’emballement technologique des bases direct drive au pédales load cell

Au-delà du contenu, c’est le contenant qui va devenir la nouvelle force centrifuge du simracing. La décennie 2010 marque l’émergence de révolutions techniques majeures. À commencer par le Direct Drive. Contrairement aux volants traditionnels qui transmettent la force via engrenages ou courroies, les bases Direct Drive fixent directement la roue du volant sur l’axe du moteur. Cette conception élimine les pertes mécaniques des systèmes intermédiaires, offrant un retour de force plus précis, instantané et bien plus puissant.

Leo Bodnar Electronics première base direct drive simracing Logitech G
La première base direct drive © Leo Bodnar Electronics

C’est l’équipementier britannique Leo Bodnar Electronics qui commercialise en 2013 la première base Direct Drive grand public, le SimSteering 6 Nm. Si pour l’époque ses caractéristiques impressionnent, son prix aussi. Environ 3 500 €. Rapidement, la concurrence entre dans cette course technologique, mais les bases restent coûteuses. D’autant qu’elles ne sont que l’élément d’un tout.

Dans le même temps, les volants ont aussi évolué. Ergonomie améliorée, design inspiré des modèles de courses, tandis que l’aluminium et le carbone remplacent peu à peu le plastique sur les modèles haut de gamme. L’intégration de nombreux boutons, molettes et palettes, ainsi que l’ajout d’écrans LCD sur certains modèles, ont par ailleurs inauguré les réglages en temps réel durant les courses.

Les pédaliers passent aussi à la vitesse supérieure

Les pédaliers ne sont pas en reste durant cette décennie 2010-2020. D’une part, les mécanismes à ressorts ont progressivement cédé la place à des systèmes hydrauliques, simulant plus fidèlement la dureté et la progressivité du freinage grâce à l’ajout d’un fluide dans le mécanisme.

Logitech G - simracing reportage pédalier RS50 2025
Nouveau pédalier RS50 dévoilé en septembre 2025 © Logitech G

D’autre part, les potentiomètres mécaniques ont été remplacés par des capteurs à effet Hall. Ces derniers troquent le le contact mécanique par un champ magnétique généré par un aimant. Ce qui a pour incidence de réduire fortement l’usure. Enfin, la technologie Load Cell est venue parfaire l’expérience. En mesurant non plus la position du pied, mais la force exercée, la sensation de freinage a commencé à devenir plus vraie que nature.

Une démocratisation matérielle dopée par le Covid et… par Fanactec

Si le simracing reste à ce jour une pratique nécessitant un certain budget, la période du Covid a joué un rôle inattendu de catalyseur. Confinés chez eux, de nombreux passionnés ont intensifié leur activité, tandis que de nombreux curieux ont commencé à suivre les compétitions en ligne.

D’autant que, privés d’asphalte, plusieurs pilotes professionnels, à l’image du Monégasque Charles Leclerc, ont multiplié les courses virtuelles tout en donnant rendez-vous à leurs fans pour les suivre. Cette dynamique médiatique a permis d’attirer un public plus large, mais ce n’est pas la seule raison. Comme nous l’explique Olivier Pastor, créateur de Superchicane, un des médias français les plus populaires dans le simracing.

Logitech G - simracing superchicane
Olivier Pastor dans une vidéo de test sur sa chaîne © Superchicane

« Durant la pandémie, Fanatec a bousculé le simracing avec le lancement du CSL DD. Soit, la première base Direct Drive vraiment accessible financièrement, environ 350 € pour sa version standard 5 Nm. Mieux encore, un bundle, incluant base, volant et pédalier, tournait autour de 700 €. Ils étaient en rupture de stock à l’époque. Ce fut un véritable coup de pied dans la fourmilière qui a élargi considérablement la base d’utilisateurs. Il existe clairement un avant et un après CSL DD. À partir de ce moment, la concurrence a dû revoir ses prix à la baisse, ou au moins avoir une offre d’entrée de gamme sérieuse. D’autant que des marques chinoises comme Moza et Simagic ont profité du contexte Covid pour s’imposer plus fortement en Europe. »

Logitech G, plus de 20 ans au service du simracing

Acteur historique dans le simracing, Logitech, qui a créé en 2013 sa marque gaming Logitech G, n’a pas attendu la pandémie pour se faire un nom auprès des passionnés. En 2006, l’entreprise suisse frappe fort avec le lancement du G25, un volant à retour de force qui a marqué toute une génération de simracers.

RS50 Direct Drive simracing Logictech course automobile
RS50 Direct Drive © Logitech

Ses successeurs, le G27 (2010), puis les très populaires G29 (2015) et G923 (2020), continuent d’équiper de nombreux joueurs grâce à leur robustesse et leur accessibilité. Longtemps spécialiste des systèmes à engrenages et courroies, Logitech G prend le virage du Direct Drive en 2022 avec son premier modèle, le G Pro Racing Wheel de 11 Nm, équipé de la technologie propriétaire TrueForce.

Puis, en septembre 2025, lors de son rendez-vous annuel Logitech G PLAY à Madrid, la marque a présenté sa nouvelle base Direct Drive G RS50. C’est dans ce cadre que nous avons rencontré Richard Neville, chef de produit mondial Simulation, qui nous a résumé les grandes étapes de développement d’un produit.

Richard Neville Logitech G
Richard Neville © Logitech G

« Notre défi est de créer des produits qui conviennent au plus grand nombre. Il faut trouver l’équilibre, car certains joueurs veulent des produits à 1 500 euros, d’autres cherchent des solutions plus abordables. Le développement d’un produit chez Logitech G passe par une phase longue et rigoureuse de conception. Elle peut durer jusqu’à trois ans. Par exemple, pour un volant, nous partons souvent de trois axes principaux, avec 10 à 15 variantes par axe. En parallèle, des équipes travaillent de manière constante sur des innovations, susceptibles d’être intégrées dans nos futurs produits. Ce fut le cas de notre technologie TrueForce, un système capable de traiter en temps réel les données physiques et audio des jeux. »

F1 et simracing, le cas d’école Logitech G avec McLaren

Conscient que l’avenir du simracing a autant besoin de produits accessibles et de qualité que de médiatisation, Logitech G s’est associé en 2017 avec l’un des monuments de la F1, l’écurie McLaren. Plus que logique, cette convergence n’est bien évidemment pas la seule. Depuis deux décennies, Thrustmaster travaille avec Ferrari, notamment sur la reproduction de matériels de course. De son côté, Fanatec collabore avec BMW M Motorsport et Porsche, tandis que plus récemment la marque chinoise Moza Racing est devenue partenaire de Lamborghini.

Logitech / McLaren partenariat depuis 2017
© Logitech G

Pour autant, pour Richard Neville, le partenariat entre Logitech G et McLaren se distingue par son caractère multidimensionnel.

« Nous avons d’abord œuvré pour sensibiliser aux courses virtuelles. Tout a commencé en 2017 avec le World’s Fastest Gamer, une compétition visant à dénicher les meilleurs simracers amateurs. De cette initiative est née l’équipe officielle McLaren Shadow, qui représente l’écurie dans les compétitions internationales. Enfin, depuis 2020, le Logitech McLaren G Challenge rassemble chaque année plus de 200 000 joueurs de tous niveaux. Désormais, nous passons à une étape plus industrielle et technique. Nous collaborons directement avec les pilotes professionnels de McLaren Shadow pour comprendre leurs besoins précis. Mais, aussi avec les ingénieurs McLaren, notamment sur la conception biomécanique des volants et la science des matériaux. Et bien évidemment, nos produits sont au cœur de leurs entraînements quotidiens. »

Le portrait robot des joueurs de simracing

Pour compléter ce panorama, il est essentiel d’évoquer les joueurs et les médias spécialisés. Les deux derniers piliers de l’écosystème du simracing. Recueillir des données précises sur les joueurs reste compliqué. En effet, aucun chiffre officiel ni étude fiable à grande échelle ne sont disponibles.

Nous avons cependant identifié une communauté anglophone active sur Reddit, rassemblant plus de 300 000 membres dans le subreddit « r/simracing ». Trois sondages y ont été menés en 2022 (618 réponses), 2023 (715 réponses) et 2025 (615 réponses). Bien qu’empiriques et limités, ces résultats offrent des pistes précieuses pour comprendre les dynamiques du simracing.

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© subreddit « r/simracing »

L’âge moyen des joueurs est ainsi passé de 29 à 38 ans entre 2022 et 2025. Avec notamment, une forte baisse des 18-24 ans. En cohérence avec ce vieillissement, la pratique est aussi montée en gamme. Près de la moitié des répondants disposent d’un équipement entre 2 000 et 10 000 dollars. Le PC reste la plateforme favorite pour 86% des pilotes, tandis que Gran Turismo domine largement les courses GT. Des observations confirmées par Olivier Pastor.

« La discipline reine, c’est clairement le Grand Tourisme. Un joueur de simracing est avant tout passionné d’automobile. Conduire des modèles emblématiques comme une Porsche 911 ou une Ferrari R40 est le rêve absolu. Après la GT viennent la Formule 1, puis le rallye, le drift ou le karting. Il existe même du matériel spécifique pour piloter camions ou tracteurs. L’engouement pour les équipements haut de gamme ne m’étonne pas. Je reçois presque chaque jour des messages de passionnés cherchant des conseils pour des setups à 10 000 euros… »

À quoi ressemblera le simracing dans un futur proche?

Pour continuer à motiver les passionnés à investir, les innovations reste une des préoccupations des fabricants. Même si les recherches R&D de Logitech G restent confidentielles, Richard Neville, nous a dévoilé quelques pistes de travail.

« En cinq ans, le direct drive est devenu la norme, mais il s’agit maintenant d’exploiter au maximum le potentiel des moteurs, d’affiner la puissance et  la précision du retour de force. Nous travaillons aussi sur des solutions pour simuler les forces G, ces accélérations physiques encore impossibles à reproduire. Ce serait une révolution, même si pour cela il faudrait presque briser les lois de la physique. Pour cela, il faut être capable de tromper le cerveau, notamment via des stimulations de l’oreille interne. L’avenir du simracing se dessine en partie sur le sensoriel. »

Ces avancées ne manqueront pas d’alimenter les médias naissants et spécialisés dans le simracing. Pour l’instant, ce paysage se concentre surtout sur YouTube. Avec des chaînes comme Superchicane en France (27 000 abonnés) ou l’anglais Jimmy Broadbent qui fédère plus d’un million d’abonnés.

La Next Level Racing Motion Platform V3 - Simracing Logitech G
Quelques plateformes professionnels, comme la Next Level Racing Motion V3, se rapprochent au mieux des sensations réelles grâce à des inclinaisons avant-arrière et latérales. ©Next Level Racing

Une fois ce panorama dressé, notre point de départ pourrait prendre une autre lecture. La reconnaissance du simracing par la FIA est-elle réellement une date à marquer d’une pierre blanche ?

Pour Logitech G et le média Superchicane, la réponse est positive. Si cela permet le développement de licences et de matériel toujours plus réalistes. Néanmoins, Olivier Pastor reste lucide.

« Ce sont des acteurs qui veulent aussi leur part du gâteau. N’oublions pas que la scène esport amateur est très influente et structurée. Ce sont eux les véritables moteurs actuels du simracing. » Une réalité que tous les acteurs de cet écosystème devront impérativement garder au cœur de leurs ambitions.

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