Des utilisateurs français de Twitter ont reçu, mardi 8 août, les premiers « avis de paiement » de la part du réseau social, qui avait promis de désormais rémunérer, sous conditions, certains de ses utilisateurs générant le plus de trafic.
Le service dirigé par Elon Musk, rebaptisé « X » au mois de juillet, entend en effet verser de l’argent à ses utilisateurs ayant souscrit à l’abonnement payant Twitter Blue, à condition que leurs messages aient été vus au moins 15 millions de fois sur les trois derniers mois. Le montant versé ne dépend cependant pas du nombre de vues : il est calculé, selon une « recette » tenue secrète, en fonction du nombre de publicités vues par les abonnés Twitter Blue lorsqu’ils parcourent les réponses aux tweets de l’utilisateur souhaitant être rémunéré.
En conséquence, les premiers versements – qui englobent en théorie les rémunérations des six derniers mois, mais aucun calcul détaillé n’est fourni par Twitter – varient fortement d’un utilisateur à l’autre, y compris entre comptes ayant des audiences comparables. Le compte français AlertesInfos (320 000 abonnés) a ainsi affirmé avoir touché plus de 6 000 euros, quand le compte consacré à l’actualité du rap FrenchRapUS (265 000 abonnés) recevait environ six fois moins. De nombreux comptes francophones ayant entre 10 000 et 50 000 abonnés affichaient, quant à eux, des paiements d’environ 100 euros – soit un peu plus que le prix de l’abonnement à Twitter Blue (10 euros mensuels) sur six mois.
Modèle économique fragile
Certains comptes ayant rendu public leur paiement ont reçu des séries de critiques, parfois virulentes, considérant leur rémunération indue. Aux Etats-Unis, où les versements ont débuté à la mi-juillet, la mise en place du programme avait entraîné une importante polémique, Twitter ayant versé des sommes importantes à plusieurs militants d’extrême droite et théoriciens du complot. L’influenceur misogyne Andrew Tate, par ailleurs sous le coup d’une vaste enquête pour trafic d’êtres humains en Roumanie, a ainsi annoncé avoir touché plus de 20 000 dollars.
Reste la question du modèle économique de ce système de paiements. Des processus de partage de revenus fondés sur des principes similaires existent sur de nombreuses plates-formes, dont YouTube, Instagram ou TikTok, mais concernent surtout les contenus vidéo, qui permettent d’afficher des publicités plus lucratives que les contenus textuels. Twitter, déjà structurellement déficitaire avant son rachat par Elon Musk à la fin de 2022, a vu son chiffre d’affaires publicitaire s’écrouler depuis son changement de propriétaire. Or, c’est de ce chiffre d’affaires que dépend la capacité de la plate-forme à verser une rémunération à ses utilisateurs.
Alors que Musk a, par ailleurs, proposé dimanche 6 août que sa société paie les frais de justice des utilisateurs ayant été traités de manière « injuste » par leurs employeurs à cause de leur comportement sur le réseau social, une forte incertitude plane sur l’avenir de l’entreprise. Cette dernière a vu les difficultés financières s’accumuler ces derniers mois, et M. Musk affirme désormais vouloir faire de « X » une application multifonction, qui inclurait notamment un système de paiement et de gestions de fonds. Pour l’heure, les bénéficiaires de versements devront passer par la plate-forme de paiement externe Stripe pour récupérer leur argent.