À mesure que l’intelligence artificielle (IA) passe du statut d’outil à celui de véritable assistant, son rôle sur le lieu de travail s’élargit. De quoi transformer fondamentalement le mode de fonctionnement des entreprises. Les dernières recherches de Microsoft identifient un nouveau type d’organisation sous le nom de « Frontier Firm ». Dans ce type d’entreprise, les besoins en intelligence à la demande sont gérés par des équipes hybrides composées d’agents d’IA et d’humains.
Ces informations sont présentées par Microsoft dans son tout récent rapport annuel Work Trend Index 2025, qui combine une enquête sur 31 000 professionnels dans 31 pays, des données de Microsoft 365, et les tendances d’embauche de LinkedIn.
Le rapport de cette année met l’accent sur le concept de « Frontier Firm ». Et selon ce rapport, chaque organisation sera sur la voie de devenir une « Frontier Firm » dans les deux à cinq prochaines années.
Le chemin vers la « Frontier Firm »
Le rapport identifie trois phases pour la transformation d’une organisation en une « Frontier Firm ».
- Dans la première phase, les employés interagissent avec des assistants pour travailler plus efficacement.
- Dans la phase 2, les humains utilisent des agents d’IA, qui fonctionnent davantage comme des « collègues numériques », exécutant des tâches sous la direction de l’homme et lui libérant du temps.
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- La phase finale (phase 3) implique que les humains travaillent avec une équipe d’agents d’IA, qui peuvent gérer des processus d’entreprise et des flux de travail entiers. Selon le rapport, cette évolution de l’IA imitera la façon dont le développement de logiciels basé sur l’IA a progressé, passant d’une assistance générale au codage à des interfaces de chat, puis à des agents capables d’exécuter la tâche au nom de l’utilisateur.
Gains de productivité
Le rapport a identifié de réels gains de productivité grâce à la mise en œuvre de l’IA dans les organisations. Jusqu’à 80 % de la main-d’œuvre mondiale, employés et dirigeants, déclarent avoir trop de travail à faire, mais pas assez de temps ou d’énergie pour le faire.
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Désormais, les entreprises peuvent « acheter de l’intelligence à volonté », et ce grâce à des agents d’IA qui agissent comme une main-d’œuvre numérique et aident les entreprises à évoluer en fonction de leurs besoins, selon le rapport.
46 % des dirigeants affirment que leur entreprise utilise déjà des agents pour automatiser les flux de travail ou les processus.
Créer ou faire des tableaux croisés dynamiques ?
Cependant, l’ajout de l’IA ne suffit pas. Car la vitesse à laquelle les entreprises évoluent dépasse celle à laquelle les gens travaillent. Et un changement plus important est nécessaire pour repenser les tâches basées sur la connaissance.
Selon le rapport, les dirigeants d’entreprise doivent accepter que les humains sont capables d’accomplir des tâches de haut niveau, telles que la créativité et le jugement, et qu’ils ne devraient pas être obligé de répondre à des courriels. La conséquence technologique de cela, c’est que les professionnels qui passent leur temps à écrire des courriels et à créer des tableaux croisés dynamiques pourront bientôt dire qu’ils créent et gèrent des agents pour faire cela.
Mais le chemin vers cette situation est encore long.
Le rapport montre que seuls 844 employés sur un échantillon de 31 000 personnes travaillaient dans des entreprises qui présentent les cinq caractéristiques des Frontier Firms :
- Déploiement de l’IA à l’échelle de l’organisation
- Maturité face à l’IA avancée
- Utilisation d’agents d’IA
- Projet de déploiement d’agents d’IA
- Conviction que les agents d’IA sont essentiels à la réalisation d’un ROI en matière d’IA
Dans ces entreprises :
- 71 % des professionnels déclarent que leur entreprise est prospère, contre seulement 37 % pour l’ensemble de la population interrogée.
- 55 % déclarent qu’ils sont en mesure d’accepter plus de travail, contre 20 % pour l’ensemble de la population interrogée.
- Et 90 % déclarent qu’ils peuvent faire un travail plus significatif, contre 73 % pour l’ensemble de la population interrogée.
- Ces professionnels sont également moins susceptibles, 21 % contre 38 %, de craindre que l’IA ne prenne leur emploi.
Changements dans la main-d’œuvre
Au-delà des résultats positifs de l’IA, il y aura des changements inévitables dans l’apparence et le fonctionnement de la main-d’œuvre. Chaque secteur vivra la transformation différemment, l’IA étant appelée à créer de nouveaux emplois et à en remplacer d’autres.
Parmi les chefs d’entreprise interrogés, 45 % ont déclaré que l’augmentation de la capacité des équipes grâce à la transformation numérique était une priorité absolue dans les 12 à 18 prochains mois. Les trois principaux domaines d’investissement accéléré dans l’IA sont :
- Le service à la clientèle
- Le marketing
- Le développement de produits
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Une question d’équilibre
Les chercheurs ont constatent aussi qu’un élément clé est d’obtenir un bon ratio homme-agent. Ce concept renvoie à la recherche d’un équilibre entre le fait d’avoir trop peu d’agents par personne et de sous-utiliser leur potentiel, ou de surcharger la capacité humaine avec trop d’agents par personne.
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À titre d’exemple d’équilibre, le rapport cite une étude de Harvard qui montre qu’un individu doté d’une IA est plus performant qu’une équipe dépourvue de cette technologie. Mais qu’une équipe dotée d’une IA est plus performante que tous les membres de l’équipe. Cette tendance met en évidence le fait qu’une organisation obtiendra de meilleurs résultats si elle dispose d’une équipe plus importante associée à l’IA, plutôt que d’utiliser la technologie pour réduire complètement le besoin d’humains.
« Je ne pense pas qu’il faille réduire les effectifs et les remplacer par l’IA. Je pense qu’il faut maintenir les effectifs et les augmenter avec l’IA pour obtenir les meilleurs résultats », indique un des auteurs de l’étude.
Un coéquipier plutôt qu’un outil
Un autre élément de cette évolution consiste à considérer l’IA comme un coéquipier plutôt que comme un outil. Cela permet à la technologie d’assumer des tâches de plus haut niveau telles que la gestion de projets. Cependant, 52 % des personnes interrogées considèrent actuellement l’IA comme un outil de commande, et 46 % comme un partenaire de réflexion.
« Si nous l’utilisons comme un moteur de recherche ou une feuille de calcul, elle ne produira pas le même rendement que si nous l’utilisons comme un collègue numérique, où nous itérons et réfléchissons ensemble », mentionne l’étude.
Pour maximiser les performances des agents d’IA, il faut se familiariser avec les problèmes de gestion, notamment la délégation, l’itération, l’incitation et le perfectionnement de la technologie. Le besoin d’une personne pour gérer ces équipes d’agents d’IA a conduit à la création d’un nouveau rôle, celui du patron d’agents.
« Tout le monde devra gérer des agents »
« Tout le monde devra gérer des agents » dit l’étude. « Avec les agents, toute personne en début de carrière pourra faire l’expérience de la gestion dès le premier jour, dès son premier emploi ».
En conséquence l’organigramme traditionnel des entreprises pourrait également subir quelques changements.
Microsoft compare ce nouveau système de travail aux plateaux de production cinématographique dans lesquels des équipes se réunissent pour réaliser le projet et se dissolvent une fois le travail achevé. De la même manière, différents agents d’IA travailleront ensemble pour atteindre rapidement un objectif, puis passeront à un nouveau projet.
Les professionnels dotés de compétences en matière d’IA sont également très demandés :
- 47 % des chefs d’entreprise considèrent le perfectionnement de leur personnel comme une priorité absolue au cours des 12 à 18 prochains mois
- 51 % des cadres affirment que la formation ou le perfectionnement en matière d’IA deviendra une responsabilité essentielle pour leurs équipes d’ici cinq ans
- 35 % envisagent d’embaucher des formateurs en matière d’IA pour guider l’adoption par les employés au cours des 12 à 18 prochains mois