Avec dix-sept hommes accusés et une quarantaine de femmes parties civiles, le procès de l’affaire « French Bukkake » va se tenir devant la cour criminelle départementale de Paris. Les deux juges d’instruction en charge de cette tentaculaire procédure ont rendu ce jeudi 31 août leur ordonnance de mise en accusation, poursuivant globalement les réquisitions émises par le parquet avant l’été.
Dans ce dossier majeur, par le nombre de ses protagonistes, par la mise au jour d’un système de prédation et d’exploitation des femmes pour produire des vidéos consommées par des centaines de milliers de personnes, les chefs d’accusation sont éloquents : « viols en réunion », « traite d’être humains en bande organisée » ou encore « proxénétisme aggravé ».
Au début de l’histoire, il y a une patrouille numérique des gendarmes de la section de recherches de Paris qui s’étonnent de cette proposition faite aux amateurs du site de vidéos pornographiques French Bukkake : les membres les plus fidèles peuvent s’inscrire pour participer à de vrais bukkakes, soit des réunions d’hommes cagoulés, le pantalon baissé, se masturbant en même temps sur une seule femme, qui apparaît apeurée sur les images. La violence des vidéos et des pratiques posent rapidement des questions pénales, auxquelles les enquêteurs vont répondre en recueillant les témoignages et les plaintes de victimes du réseau.
Victimes manipulées, dupées
Les jeunes femmes ont des récits convergents, celui d’un recrutement frauduleux pour tourner dans ces films. Sur les réseaux sociaux, elles ont été contactées par « Axelle Vercoutre », une fausse escort-girl clinquante qui cache un vrai manipulateur, Julien Dhaussy. Il les fait ensuite venir dans un hôtel de Reims, la ville où il habite, au nom d’une fausse passe, qu’il transforme en viol qu’il commet sur elles. Une fois leurs défenses psychiques brisées, précarisées par l’argent qu’elles n’ont pas gagné, elles acceptent à contrecœur de participer aux tournages de « Pascal OP », le patron de French Bukkake.
Dans sa dernière audition par le magistrat instructeur, Julien Dhaussy minimise les violences que les femmes subissent sur les tournages par sa faute : « Dans le cinéma traditionnel, je ne suis pas sûr que toutes les actrices s’entendent bien avec le réalisateur. Qu’il y ait incompatibilité d’humeur parfois entre deux personnes, j’étais loin de penser que l’on pourrait partir sur des notions de viol juste pour une mésentente. »
Julien Dhaussy envoyait donc les jeunes femmes sur les tournages de Pascal Ollitrault, dit « Pascal OP », qui suscitait les interrogations des professionnels du porno français. Il était à la fois connu pour ses vidéos « hard » et les participantes sans cesse renouvelées qu’il trouvait. Entendu en avril 2022, il analysait ainsi ses nombreuses mises en examen pour viol : « Je pense qu’elles se victimisent (…). C’est plus facile pour elles de dire qu’elles ont été abusées plutôt que de dire clairement à leurs familles qu’elles sont venues volontairement faire des films pornographiques. »
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