Une directive européenne, adoptée mardi en assemblée plénière au Parlement européen, vient renforcer le « droit à la réparation » des consommateurs, qui pourront plus facilement faire réparer leurs smartphones et d’autres produits électroniques. Obligation de réparation étendue, meilleure information, fin des barrières contractuelles entravant la réparation… Voici ce qu’il faut en retenir.
Une réparation de votre smartphone bientôt moins chère et plus accessible ? C’est l’objectif de la nouvelle directive sur le droit à la réparation qui a été adoptée, mardi 23 avril, par l’assemblée plénière du Parlement européen. Les consommateurs auront bientôt, en Europe, un « droit à la réparation renforcé » pour leurs machines à laver, leurs aspirateurs, mais aussi pour leurs smartphones et leurs tablettes. Plus qu’un droit, pour René Repasi, l’Eurodéputé allemand (S&D) rapporteur du texte qui s’exprimait lors d’une conférence de presse mardi, « il sera plus simple et meilleur marché d’opter pour la réparation plutôt que d’acheter de nouveaux produits plus coûteux. Le droit des consommateurs à la réparation des biens va maintenant devenir une réalité ».
De quoi éviter « les 35 millions de tonnes de déchets générés chaque année dans l’Union européenne (UE) » par « l’élimination prématurée des biens de consommation », détaille la Commission européenne, citée dans le communiqué du Parlement européen de ce jour. Concrètement, le texte a pour objectif de faciliter et d’inciter à la réparation, avec de nouvelles obligations incombant aux fabricants de produits. Nuance importante, cette directive définit de nouvelles obligations incombant aux fabricants comme Apple, Samsung ou Xiaomi, et non aux vendeurs comme les plateformes en ligne Amazon. Ces fabricants devront désormais « fournir des services de réparation rapides et rentables et informer les consommateurs de leurs droits en la matière ».
Il existe en effet de nombreux obstacles, aujourd’hui, qui n’incitent pas à opter pour la réparation, « parce que celle-ci est impossible ou hors de prix. En prenant l’ensemble de ces éléments, en les traitant séparément, nous allons, en fait, rendre le marché de la réparation plus attractif et le transformer en option économique accessible », a souligné René Repasi, pendant la conférence de presse.
12 mois supplémentaires de garantie si on a déjà fait réparer le produit dans les deux ans de l’achat
La directive s’attaque d’abord à la garantie légale pendant laquelle le fabricant est obligé de « réparer (ses produits) à un prix, et dans un délai, raisonnables ». Concrètement, si un dysfonctionnement apparaît dans les deux ans de l’achat – le dysfonctionnement devant exister lors de cet achat – le fabricant doit réparer le produit : cette obligation s’applique pendant deux ans à compter de l’achat – ce qu’on appelle la garantie légale, que la directive va étendre. Pour les produits qui ont été réparés dans ce délai de deux ans, l’obligation jouera encore douze mois supplémentaires.
La fin des barrières contractuelles à la réparation ?
Mais le texte s’applique aussi lorsque le dysfonctionnement apparaît pendant l’utilisation de l’appareil, comme un écran qui se fissure ou qui se brise après une chute. La directive prévoit en effet que les fabricants « mettent à disposition, et à un prix raisonnable, les produits nécessaires à la réparation » de leurs appareils. Ce qui veut dire que « les pièces détachées, de remplacement » devraient être accessibles, y compris financièrement.
Exit donc toutes les clauses ou les barrières contractuelles destinées à rendre la réparation excessivement chère ou difficile, comme « le fait de supprimer la garantie si on répare avec une pièce non contractuelle, ou de mettre en place des frais excessifs pour pouvoir accéder à l’outil qui permettra la réparation », détaille René Repasi, membre du parti social démocrate allemand.
Terminées aussi « les techniques matérielles ou logicielles entravant les réparations. En particulier, (les fabricants) ne pourront pas empêcher les réparateurs indépendants d’utiliser des pièces détachées d’occasion ou imprimées en 3D, ni refuser de réparer un produit uniquement pour des raisons économiques ou parce qu’il aurait été précédemment réparé par quelqu’un d’autre », détaille le communiqué de presse.
Ces obligations n’heurtent-elles pas la politique actuelle d’Apple, même si la marque à la pomme a lâché un peu de lest, tout dernièrement, sur la sérialisation de ses pièces détachées ? Le rapporteur du texte, interrogé précisément sur ce point, a déclaré que : « si un réparateur indépendant ouvre aujourd’hui un iPhone avec ses propres outils, et pas des outils Apple, ou s’il n’utilise pas des pièces d’origine, le consommateur perd ses garanties chez Apple. Certaines applications ne fonctionnent alors plus », souligne-t-il. « Ce type de barrière sera interdit, normalement, au titre de la directive sur le droit à la réparation », avance-t-il prudemment. « Apple devra prouver qu’il est absolument nécessaire de maintenir cette barrière pour protéger sa propriété intellectuelle, ce qui ne devrait pas être si simple, et ce qui se terminera certainement devant les tribunaux. Ces pratiques devraient être considérées, à mon sens, comme illégales », a ajouté le parlementaire européen.
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Des bons de réparation pour les consommateurs
Les consommateurs pourront bénéficier d’« incitations » à la réparation, comme des bons de réparation ou des financements qui devront être mis en place par les gouvernements des 27 États-membres. Ils pourront trouver des services de réparation locaux et des magasins vendant des produits reconditionnés, grâce à des plateformes en ligne prévues par la directive. Ils pourront faire réparer leurs appareils chez le réparateur de leur choix, qui n’aura pas à être affilié au fabricant. Les prix des réparations (indicatifs) seront accessibles en ligne. Il est aussi prévu qu’ils puissent avoir des appareils de prêt, le temps que leur produit soit réparé.
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Selon le texte, les appareils concernés sont, outre les smartphones et les tablettes, les lave-linges, les lave-vaisselles, les appareils de réfrigération, les aspirateurs, mais aussi les serveurs et produits de stockage de données.
Cette directive s’inscrit dans l’objectif plus général de l’Union européenne, de parvenir à « une consommation durable définie dans le pacte vert », la feuille de route environnementale de l’Europe. Elle doit se lire avec un autre texte, le règlement sur l’écoconception pour des produits durables (REPD), qui a aussi été adopté mardi par le Parlement européen, et qui protège davantage le consommateur de l’obsolescence programmée.
Ce dernier impose aux fabricants, au stade de la production d’appareils électroniques, des obligations et des exigences en matière de conception des produits et de disponibilité des pièces de rechange. Ainsi, « selon ce REPD, les fabricants doivent réparer leurs biens pendant dix ans, et assurer des stocks de pièces détachées pendant cette même période. Ce qui veut dire qu’après dix ans, le consommateur n’aura plus de droit opposable, en quelque sorte, à la réparation », a précisé le parlementaire européen.
Il faudra cependant attendre avant de voir se concrétiser ces nouvelles règles. Car si la directive a bien été adoptée par le Parlement européen ce mardi, elle doit encore passer par différentes étapes avant d’être effective. Elle devra notamment être transposée dans le droit national, dans les deux ans suivant sa publication au journal officiel de l’UE, soit… en 2026.
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