« Le message que je veux porter à Londres est le suivant : sur l’intelligence artificielle, l’Europe doit innover avant de réguler », martèle Bruno Le Maire, qui représente, jeudi 2 novembre, la France au Sommet sur les risques de l’intelligence artificielle (IA) organisé par le premier ministre britannique, Rishi Sunak, en présence de représentants d’entreprises du secteur et d’Etats, comme la vice-présidente américaine, Kamala Harris, ou la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. « Il est illusoire de vouloir réguler de notre côté si on ne participe pas à l’émergence de cette technologie, argumente le ministre de l’économie. La régulation est indispensable, mais elle sera plus efficace si nous disposons d’acteurs européens qui maîtrisent l’IA. »
Pour M. Le Maire, l’Europe ne doit pas répéter les erreurs de la « dernière révolution technologique des années 1990 », qu’elle a « ratée », ne disposant aujourd’hui « d’aucun géant » de l’Internet grand public. « Une nouvelle révolution est devant nous avec l’IA générative [capable de produire des textes ou des images, comme ChatGPT, Bard ou Midjourney]. Soit on met les bouchées doubles pour rattraper notre retard, soit, dans trente ans, tous les grands acteurs seront américains ou chinois, avec la perte de capital économique et culturel que cela implique », insiste le ministre.
Cet « appel à se réveiller » contraste avec la tonalité plus alarmiste du sommet britannique, centré sur les risques « existentiels » de l’IA, comme la possibilité de voir des logiciels échapper au contrôle humain ou faciliter le lancement d’attaques informatiques ou la création d’armes biologiques. « Si on écoute certaines présentations apocalyptiques, on a l’impression que des robots hostiles vont débarquer dans nos rues », ironise le ministre, jugeant plus prioritaires des sujets comme l’accès aux ressources informatiques nécessaires pour entraîner des modèles d’IA générative, dans un contexte de domination du secteur par le fabricant de puces Nvidia.
« Un point de divergence important »
Ce discours rappelle celui tenu par Emmanuel Macron en juin : le président de la République s’était inquiété des effets sur l’innovation des projets de réglementations européens, appelant à créer des « champions » locaux. Cette offensive relayait les demandes d’acteurs français, comme les fabricants de modèles de traitement du langage LightOn ou Mistral AI. Ceux-ci avaient cosigné une tribune dans Les Echos avec d’autres entreprises de tous secteurs ou Cédric O, ancien ministre du numérique devenu conseiller de Mistral AI.
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