Amazon embauche un humanoïde, un robot bipède qui va devoir « collaborer »

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À Seattle, sur l’un de ses sites de distribution, Amazon a annoncé l’introduction de Digit, un humanoïde bien plus polyvalent que les robots déjà utilisés par la société. Une annonce de taille à l’heure où le turn-over coûte cher à Amazon, et que 27 000 emplois ont été supprimés en 2023.

Entre Seattle et San Francisco, Amazon convoite Agility Robotics depuis le mois d’avril et une levée de fonds de 150 millions de dollars. Dans la petite ville de Salem, dans l’Oregon, un robot humanoïde attend le top départ pour pouvoir lancer sa production de série, avec l’objectif d’atteindre 10 000 unités par an d’ici 2026. Les usines baptisées « Robofab » sont prévues pour la fin de l’année et la jeune startup lancée par Damion Shelton, un ancien responsable des opérations de l’iPad chez Apple livrera ses « clients préférés » début 2024. Après Ford, Amazon vient d’annoncer son utilisation ce mercredi 18 octobre.

Contrairement à tout ce que proposait le géant du e-commerce jusqu’à présent, le robot Digit sera bien un bipède, doté de deux bras, d’une tête, pour un usage polyvalent. Bien plus que des tâches, ce sont des gestes que l’humanoïde viendra effectuer à la place d’employés. Amazon suggère qu’il s’agira avant tout d’utiliser Digit sur le recyclage des bacs vides utilisés pour la préparation des commandes des clients. Un processus jugé très répétitif, principal problème relevé sur le chapitre de la santé au travail chez les employés Amazon des centres de préparation des commandes.

Une première phase de test va commencer dans le sud de Seattle, dans le nord-ouest des Etats-Unis, où Amazon possède le « BFI1 », un centre de distribution aussi utilisé pour intégrer de nouvelles technologies et de nouvelles méthodes logistiques à l’international.

© Agility Robotics

Du côté de chez Agility Robotics, on prône bien plus de compétence. Digit sera capable de monter et descendre des marches d’escalier, de se déplacer dans des espaces restreints, et d’évoluer aux côtés des employés. D’où le besoin de choisir le format d’un humanoïde de 1,75 m : le meilleur pour pouvoir garantir la réalisation de ces actions tout en garantissant l’équilibre du robot. « Il s’agit d’un projet de grande envergure, qui ne se résume pas à une simple pression sur un interrupteur », expliquait le mois dernier Aindrea Campbel. Le bipède peut fonctionner 2 heures grâce à ses batteries, qui se rechargent en une heure.

Cependant, certains éléments tels que les mains n’ont plus vocation à ressembler directement à celles des êtres humains. « Vous ne devriez pas avoir une main qui ne soit plus complexe que celle dont vous avez besoin pour le travail », déclarait le co-fondateur d’Agility Robotics. Tesla n’est pas de cet avis avec son humanoïde Optimus, mais celui-ci est encore au stade de prototype. D’autres acteurs cherchent également à rassembler le plus possible à des humains, comme Figure AI en Californie, qui prône le développement de son robot par 10 millions d’emplois à pourvoir aux États-Unis, qui ne trouvent personne du fait de leur difficulté malgré leur importance cruciale.

Les références du secteur sont Tesla (par ses moyens et sa médiatisation), Xiaomi (pour les interactions avec les humains) et Boston Robotics (par son savoir), mais il faudra aujourd’hui faire de la place à de nouveaux acteurs, motivés par des grands groupes prêts à investir en masse. En parallèle à Agility Robotics, il y a Apptronik, qui a déjà travaillé pour proposer un bipède à la NASA. Au cours de l’été, la société basée à Austin au Texas a lancé un nouveau modèle baptisé Apollo, dont la pleine production est prévue pour la fin de l’année 2024 et l’usage ultra-polyvalent assumé, qui ne limiterait pas la place d’un humanoïde à un entrepôt.

Amazon Sequoia Robot
© Amazon

Collaboration robotique

La différence entre les acteurs se trouve ironiquement du côté de la masse salariale, alors q’Agility Robotics embauche 500 employés, comme Boston Dynamics, alors qu’Apptronik se limite pour l’heure à une équipe de 85 personnes. Amazon Robotics, le client d’Agility Robotics, développe d’autres robots en interne qui complète le travail rendu automatique chez Amazon, tel que le déplacement des colonnes de stockage des produits dans les entrepôts avec le nouveau robot Sequoia, ou encore le bras articulé Cardinal.

« Je crois en la collaboration robotique, au projet d’atteindre un flow entre le travail des différents robots et leur collaboration avec les humains », s’exprimait Tye Brady, le responsable technologique d’Amazon Robotics, lors d’une conférence dans le sud de Seattle où 01net s’est rendu. Le mot magique pour faire passer la pilule : une collaboration entre robots et salariés et non un vol des emplois. Damion Shelton n’hésitait pas à évoquer le besoin crucial de main d’oeuvre à ce jour pour certaines tâches, et la difficulté dans le secteur de la manutention à voir des employés choisir de partir. Chez Amazon, selon des documents internes révélés en octobre 2022, sur les employés embauchés en 2021, deux tiers se seraient résignés à partir en moins de 90 jours.

Tye Brady Emily Vetterick Amazon Robotics
En conférence à Seattle, Tye Brady, le responsable technique d’Amazon Robotics, annonce l’introduction de Digit, le robot humanoïde d’Agility Robotics chez Amazon © 01net

Réduction des coûts, objectif record

L’annonce arrive dans un contexte particulier, quelques mois après la suppression de plus de 27 000 postes chez Amazon, et un ralentissement de la croissance de l’activité e-commerce, après des années records en plein Covid. Depuis 2019, le chiffre d’affaires d’Amazon a presque doublé (280 milliards versus 514 milliards de dollars), et les résultats du troisième trimestre 2023 mènent à penser que la croissance des ventes serait de retour après un épisode inflationniste de taille et le renforcement d’une politique de réduction des coûts.

La politique du nouveau patron d’Amazon, Andy Jassy, a ainsi été particulièrement saluée avec un bond de 10 % en Bourse. Il faut dire que la nouvelle balance économique a permis à Amazon de dégager son plus important bénéfice depuis le quatrième trimestre 2020. Et ce malgré un ralentissement de la croissance de l’activité cloud du côté de AWS (Amazon Web Services). Le détail sur le turn-over révélé l’année dernière aurait déjà coûté à lui seul 8 milliards de dollars à la compagnie, et une réduction de 15 % de ce dernier permettrait d’économiser 726 millions de dollars par an.

La porte ouverte à des robots comme Digit, qui n’auraient pas uniquement comme intérêt de remplacer des employés sur le départ, mais aussi de ralentir le besoin de certains à quitter l’entreprise, faute de s’y retrouver en matière de santé et de sécurité au travail, face aux tâches répétitives. « Nous sommes qu’aux prémices de la robotique, et il nous a pris 15 ans pour en arriver là », finissait par dire Tye Bardy.



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