de la naissance de « FIFA » à son changement de nom, trente ans d’évolution

de la naissance de « FIFA » à son changement de nom, trente ans d’évolution


« Les millésimes FIFA, c’est comme le pinard, il y a de bonnes années et de moins bonnes. » Dès 1997, le magazine spécialisé Joystick pronostiquait les hauts et les bas de la longue carrière à venir de cette série de jeux vidéo à succès. Cette année-là, le journaliste opposait « la piquette » FIFA 97 au « bon cru » FIFA 98 : En route pour la Coupe du monde.

Déclinée au rythme soutenu d’un épisode par an depuis 1993, la franchise d’Electronic Arts (EA) est confrontée à un défi permanent : réutiliser chaque année la même recette tout en maintenant l’attention du public.

Cette image répertoriée par le site « Know Your Meme » se moque de la proposition quasi inchangée de chaque édition de FIFA : offrir la simulation de football la plus réaliste du marché.

Sa carrière de bientôt trente ans révèle toutefois quelques tournants majeurs qui racontent à la fois l’évolution du médium vidéoludique ainsi que l’irrésistible succès de cette licence, dont chaque déclinaison se place en tête des ventes annuelles en France depuis 2014.

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Mais l’année 2022 est celle d’un virage inédit pour FIFA : le 10 mai, après des mois de tractations avec la Fédération internationale de football, EA a annoncé que son jeu-phare changerait de nom pour s’appeler, à compter de l’été 2023, EA Sports FC. A cette occasion, retour sur neuf épisodes-clés qui ont transformé FIFA.

Années 1990 : l’outsider

  • « FIFA International Soccer » (1993) : premiers buts

A sa sortie en décembre 1993 sur Megadrive, FIFA est immédiatement plébiscité pour son réalisme technique : « de véritables tactiques de jeu dans la cartouche », s’enthousiasme le magazine spécialisé Player One. Les efforts portés sur la bande-son et les animations des personnages permettent aussi une immersion plus poussée que la concurrence. « Jamais je n’avais vu une telle palette de mouvements pour un simple joueur », relève le journaliste de Joystick lors de la sortie sur PC.

Ce succès en Europe est une surprise totale pour EA, plus porté sur le football américain (Madden) ou le hockey sur glace (NHL). « En interne, les gens ne savaient même pas ce que c’était que la FIFA », confiait au Monde en 2015 Marc Aubanel. Celui qui fut le premier producteur de la série explique que l’éditeur américain s’est notamment décidé à s’y risquer en raison de l’organisation de la Coupe du monde aux Etats-Unis en 1994.

« FIFA », premier du nom, sort le 15 décembre 1993 sur la MegaDrive, la console 16-bit de Sega, avant d’arriver l’année suivante sur d’autres plates-formes (Super Nintendo, PC ou Amiga).
  • « FIFA Soccer 96 » : l’entrée dans la modernité

Loin d’être l’épisode le plus abouti, le troisième FIFA est pourtant déterminant pour l’ADN de la série. Pour la première fois, grâce à un accord avec la Fédération internationale des associations de footballeurs professionnels (Fifpro), la simulation utilise le véritable nom des joueurs. Avant cela, les développeurs accolaient aux sportifs et aux équipes des noms fantaisistes ou vaguement évocateurs. FIFA 96 réalise une autre mue de taille en proposant, pour la première fois, des graphismes en 3D.

  • « FIFA 98 » : champion du monde… du foot virtuel

En décembre 1997, l’équipe de France n’est pas encore championne du monde mais FIFA 98 : En route pour la Coupe du monde (et de quelques mois, son quasi-jumeau, le jeu Coupe du monde 98) s’impose comme l’un des sommets du football vidéoludique des années 1990. Un opus qui parie sur l’immersion avec 6 400 joueurs de football, 172 sélections nationales, 189 clubs, 11 ligues et, pour la première fois, des répliques virtuelles de véritables stades. Des commentaires de matchs réalisés par des professionnels, Thierry Gilardi et David Ginola pour la version française, trouvent leur place pour la première fois dans la simulation. Enfin, sa bande originale pop marque les esprits. Elle contient l’entêtant Song 2 de Blur qui est au rock des années 1990 ce que FIFA 98 est au jeu vidéo : un classique.

L’un des intérêts de « FIFA 98 : En route pour la Coupe du monde » était de composer son équipe de rêve en effectuant des transferts de joueurs connus, comme un vrai sélectionneur.

Années 2000 : l’affrontement avec « PES »

  • « FIFA 2001 » : hors-jeu

Sur le plan technique, FIFA 2001 est un pionnier car il propose pour la première fois des matchs en ligne sur PC. Ce dispositif est aujourd’hui incontournable. Mais sur le plan ludique, l’héritage est faible. Les puristes lui préfèrent alors ISS Pro Evolution 2 (2000), le dernier épisode en date de la série concurrente International Superstar Soccer, lancée en 1994 par le studio japonais Konami. Une redoutable rivalité s’installe dès lors entre FIFA et ISS, devenue entre-temps Pro Evolution Soccer (PES).

Ce dernier s’affirme peu à peu comme « une simulation “pure et dure” [qui] reproduit au plus près de la réalité les gestes, les techniques et le rythme d’un vrai match de football », comme le relevait Le Parisien en 2006, à l’opposé de la « facilité d’approche » de FIFA. Pendant une bonne demi-douzaine d’années, la popularité de FIFA bat de l’aile, tandis que PES lui chipe sa place dans le cœur des gamers.

« FIFA 2001 » est le premier titre à proposer une jauge de puissance de tir.
  • « FIFA 09 » : passage réussi en HD

FIFA 08 déjà, le premier épisode pensé pour la génération PlayStation 3, amorçait un renouveau pour FIFA, grâce à un nouveau moteur de jeu à côté duquel celui de PES semblait soudain bien pataud. FIFA 09 confirme ce virage, et permet au jeu d’EA de reprendre progressivement sa place de leader de la simulation de football. « Un millésime intimidant », écrit à l’époque la Tribune de Genève. « FIFA est monté en gamme, proposant une simulation encore plus authentique », analyse le New York Times.

Lire : « FIFA », le jeu de football devenu produit culturel le plus vendu en France

FIFA 09 prend aussi des risques. Il propose l’intégration de parties en ligne à dix contre dix et d’un mode dans lequel on ne peut incarner qu’un personnage unique dans une équipe. EA y intègre aussi le jeu de cartes virtuel Football Ultimate Team (FUT), dont les microtransactions intégrées génèrent d’importants revenus.

A son lancement, « FIFA Ultimate Team » comptait un million de joueurs. En 2021, ils étaient 30 millions, selon EA.

A partir des années 2010 : ballon d’or

A cette période, la série profite aussi de l’engouement du public autour des deux joueurs d’exception que sont Cristiano Ronaldo et Lionel Messi. La fin du contrat de la star argentine avec « PES » en 2012 et sa récupération par EA pour le placer sur les jaquettes de ses jeux enterrine le triomphe de « FIFA » sur le football virtuel.
  • « FIFA 2017 » : en avant les histoires

En proposant un contrôle toujours plus fin du ballon, FIFA 10, 11, 12 et 13 assoient leur domination et figurent encore aujourd’hui, selon l’agrégateur de notes Metacritic, parmi les épisodes les plus appréciés à leur sortie. Mais comment enrichir une formule jugée quasi parfaite ? Après avoir ajouté les équipes féminines dans l’épisode précédent, FIFA 2017 s’aventure du côté de la fiction. Ce mode « Histoire », très scénarisé, propose de suivre le parcours du personnage d’Alex Hunter sur plusieurs années.

Toujours plus aguicheur visuellement et varié en termes de contenus, FIFA 17 est un triomphe en magasin. Il s’impose comme le jeu de console le plus vendu au monde en 2016, écrasant au passage Call of Duty : Infinite Warfare, d’Activision.

  • « FIFA 20 » : l’échappatoire au confinement

Les confinements liés à la pandémie de Covid-19 mettent un coup d’arrêt aux matchs de football. La pratique du foot en ligne dépasse alors largement la pratique du sport. La FIFA (la fédération) se trouve dans une situation impensable : les droits payés pour l’exploitation de la licence (158 millions de dollars) deviennent cette année-là sa première source de revenus.

FIFA 20 attire plus de joueurs que jamais (25 millions de joueurs uniques, selon EA). Surtout, FIFA Ultimate Team, une variante dans laquelle on compose son équipe avec les joueurs trouvés dans des pochettes-surprises virtuelles, devient plus populaire que le mode de jeu de base. Depuis, la justice belge a contraint l’éditeur de bloquer les achats en monnaie réelle dans FUT, principe qu’elle assimile aux jeux de hasard. D’autres procédures judiciaires à son encontre ont été lancées au Canada, aux Etats-Unis, en France ou aux Pays-Bas.

« FIFA 20 » intègre aussi le mode de jeu Volta qui propose du foot de rue.

Un trentenaire qui change de nom

  • « EA Sports FC » : premier du nom

A compter de 2023, ceux qui avaient l’habitude de « se faire un petit FIFA » vont devoir changer leurs habitudes. D’après le New York Times, trente ans après son lancement, la simulation va changer de nom, à l’issue de la Coupe du monde féminine qui se tiendra en Australie et en Nouvelle-Zélande.

Les vives discussions que cette annonce provoquaient déjà en ligne des mois précédant son officialisation révèlent que FIFA est bien plus qu’un simple jeu vidéo : il s’est hissé au rang d’icône de la culture populaire, cité dans les chansons de rap ou détourné en mèmes.

Que les amoureux du ballon rond numérique se rassurent : il y a de grandes chances que, pour l’essentiel, le cru 2023 n’évolue que très peu. En effet, la fin du partenariat avec la FIFA ne le condamne pas à perdre l’utilisation du nom des joueurs, assurée par un contrat avec la Fifpro renégocié en 2021, ou des différents championnats, négociés avec leurs organisateurs. Seule la Coupe du monde et les événements spécifiquement organisés par la FIFA devraient disparaître du jeu.



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