Les médias sociaux sont au cœur des vies adolescentes. Aux Etats-Unis, selon les chiffres 2022 du Pew Research Center, 67 % des 13-17 ans sont sur le réseau TikTok, 62 % sur Instagram, 59 % sur Snapchat… Pourtant, comment expliquer que certains deviennent plus accros que d’autres à leurs comptes ? Accros au point de développer une « utilisation problématique des médias sociaux » (PSMU pour Problematic Social Media Use). Cette appellation non officiellement reconnue comme une addiction comportementale par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) désigne « des problèmes scolaires et de fonctionnement social dont les caractéristiques sont proches de l’addiction – modification de l’humeur, conflit, rechute, tromperie… » Certains déterminants socio-économiques peuvent-ils être en cause ? C’est la question que s’est posée une équipe internationale de chercheurs en psychologie et en sciences sociales des universités de Padoue (Italie), McGill, à Montréal (Canada), Utrecht (Pays-Bas), Jyväskylä (Finlande), et du Kinneret Academic College on the Sea of Galilee (Israël).
« Nous sommes partis de l’abondante littérature sur les conséquences négatives des inégalités socio-économiques sur la santé physique et mentale des adolescents, et avons voulu tester si l’utilisation des médias sociaux était un facteur de risque, explique Michela Lenzi, de l’université de Padoue (Italie). Si l’on considère que la comparaison sociale entre pairs est très courante en ligne, nous voulions précisément évaluer si le fait d’être exposé à des contextes très inégaux (école et pays) augmente la probabilité d’utiliser ces réseaux de manière problématique. »
Pour rassembler un vaste échantillon, les chercheurs ont utilisé une étude de l’OMS, « Health Behaviour in School-Aged Children (HBSC) », menée tous les quatre ans en Europe et au Canada. Leur recherche fondée sur l’analyse, en 2017 et 2018, de 179 049 enfants de 11 à 15 ans scolarisés dans 40 pays, a été publiée le 7 septembre dans Information, communication & société.
Premier test, les adolescents ont dû répondre, sous la supervision d’un enseignant, à des questions telles que : « Au cours de l’année écoulée, avez-vous… régulièrement constaté que vous ne pouvez penser à rien d’autre qu’au moment où vous pourrez à nouveau utiliser les médias sociaux ?… essayé de passer moins de temps sur les médias sociaux, mais sans succès ?… régulièrement négligé d’autres activités (par exemple vos loisirs, le sport…) parce que vous vouliez utiliser les médias sociaux ?, etc., énumère Michela Lenzi. Tout jeune ayant répondu par l’affirmative à six questions de ce type a été identifié comme souffrant de PSMU. » Cela a été le cas de 7,2 % en moyenne des quelque 180 000 jeunes sondés.
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