Sur TikTok, le profil Mission du jour et ses vidéos virales accusés de plagiat

Sur TikTok, le profil Mission du jour et ses vidéos virales accusés de plagiat


A la fin du mois d’août, la rumeur s’est répandue comme une traînée de poudre sur les réseaux sociaux, notamment sur TikTok et X (anciennement Twitter) : la rentrée scolaire allait être décalée au 18 septembre. Une décision justifiée par un pseudo « conflit » entre la Chine et la Russie, qui aurait contraint le gouvernement français à rétablir le service militaire. A l’appui de ces allégations : un site Internet douteux faisant mine de résumer l’information dans un article de presse, un faux document de communication émanant du ministère de l’éducation nationale et une horde de commentaires coordonnés sur les réseaux sociaux assurant que l’information était authentique. A l’époque, le bobard a pris une ampleur telle que le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, a dû démentir.

L’enquête dans laquelle se sont engouffrés de nombreux médias pour remonter à l’origine de la désinformation n’a toutefois pas été longue : bien vite, les créateurs d’une application baptisée Mission du jour ont avoué qu’ils en étaient les auteurs. Dans une vidéo pleine d’autosatisfaction, Iroy et Theo Audace, pseudonymes sous lesquels se présentent les deux fondateurs, expliquent leur initiative et assurent qu’ils ne s’y attendaient pas.

Une magnifique publicité pour ceux qui ont lancé en juillet leur concept sur l’App store et le Google Play Store : avec Mission du jour, les utilisateurs – essentiellement des adolescents – sont invités à réaliser quotidiennement un nouveau challenge (comme « récupérer le plus de stylos 4-couleurs en une journée ») puis à poster des images de leurs exploits sur le réseau social TikTok. Les vidéos permettent d’engranger des points qui, à terme, sont échangeables contre de l’argent. « On donne 2 000 euros chaque semaine, qui sont partagés entre les trois personnes qui font le plus de vues », assure Iroy.

Pour faire rentrer des fonds dans les caisses, l’application dispose d’une offre payante permettant d’avoir accès à un mode multijoueur entre amis, mais elle compte surtout sur des partenariats avec les marques. Les créateurs espèrent maintenant toucher un public international avec une version anglaise et une version espagnole.

Volontairement absurde

L’histoire pourrait s’arrêter là si, dans les commentaires, de nombreux internautes n’accusaient pas les deux Français d’avoir plagié le concept d’un créateur américain, connu sous le nom de FREAKBAiT. A la fin de l’année 2021, ce Californien a en effet lancé une série de vidéos mi-artistiques, mi-saugrenues, intitulées « Today’s Mission » (« La Mission du jour »). Illustrées par des personnages dans un style VHS et minimaliste, elles proposent elles aussi des objectifs que les utilisateurs du réseau peuvent tenter de reproduire.

A la différence de son homologue tricolore, le concept d’origine se veut toutefois volontairement absurde et ne cible pas spécifiquement les jeunes à l’école. Surtout, il ne prévoit aucune récompense particulière pour ceux qui décideraient de réaliser les défis, comme l’explique FREAKBAiT : « La série originale “Today’s mission” n’avait aucune intention de monétisation ; elle visait simplement à interagir avec mon public et à créer une communauté. Le but de la série “Today’s mission” est une expérience sociale, un détournement culturel et un divertissement inoffensif. »

Lire le décryptage : Article réservé à nos abonnés De TikTok à Instagram, le triomphe controversé de la vidéo courte

L’artiste explique tirer ses revenus de la vente de produits dérivés sur son site Internet, de partenariats avec des marques souhaitant reprendre son esthétique ou de ses travaux en free-lance. Ses fans publient des vidéos les montrant en train de compléter les missions proposées, comme le compte Agentofchaos01. « Nathan (Agentofchaos01) a découvert mon concept en janvier 2023 et a commencé à publier ses vidéos de réalisation des missions, raconte FREAKBAiT. Son compte est devenu particulièrement populaire grâce à cela et je le soutiens. Mais il me crédite dans ses vidéos et il ne touche pas d’argent. »

« On ne vole pas ses images »

L’auteur voit d’un mauvais œil la soudaine popularité de Mission du jour qui, selon lui, ne fait que plagier son idée à des fins mercantiles, en témoignent sur son compte des vidéos dénonçant la reprise de son idée. Iroy et Theo Audace se défendent pourtant d’avoir « volé » le concept : « On ne le connaissait pas du tout quand on a créé l’application. On s’inspirait plutôt d’applications comme BeReal et de ce qu’on voyait sur TikTok. »

Mais lorsque l’on pointe les similitudes plus que frappantes sur le nom ou sur l’esthétique des visuels utilisés, ils bottent en touche : « On s’est inspiré de ce qu’on voyait sur d’autres comptes qui faisaient la même chose. Mais on fait nos propres modèles, on ne vole pas ses images. »

Capture d’écran des vidéos de FREAKBAiT (à gauche) et de Mission du jour (à droite), réalisées le 29 septembre sur leurs pages TikTok.

De fait, ils ne sont en effet pas les seuls à s’être engouffrés dans la brèche. FREAKBAiT explique avoir réussi à faire fermer les comptes de plusieurs autres imitateurs en les contactant directement ou en utilisant les systèmes de recours proposés par les réseaux sociaux. « Il y a également eu des imitateurs persans, slovaques, allemands et russes, mais de nombreux comptes ont été supprimés ou abandonnés avec le temps », énumère-t-il. Ce n’est pas le cas des créateurs de Mission du jour qui, tout en continuant de poster régulièrement des défis, préfèrent ignorer le créateur américain et se tenir à l’écart de ce qu’ils qualifient de « drama ».



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