un coup de filet cible des circuits de blanchiment en France

« Traitons le cybercrime organisé à l’instar du terrorisme »


C’est un mode d’escroquerie qui a explosé en 2021 : il se présente sous la forme d’un e-mail, présenté comme venant de la gendarmerie, d’Europol ou d’autres services d’enquête, le plus souvent avec un titre inquiétant. Les personnes ciblées y lisent qu’elles font l’objet d’une convocation judiciaire et qu’elles sont poursuivies pour pédopornographie, pédophilie ou trafic sexuel. Envoyés par des escrocs, ces messages sont conçus pour faire peur aux victimes et à les pousser à payer une « amende » pour échapper à de soi-disant poursuites. Le parquet estime aujourd’hui l’âge moyen des victimes à 60 ans.

Vendredi 23 juin, la section cyber du parquet de Paris, qui avait ouvert une enquête deux ans plus tôt, a annoncé une vague d’interpellations ciblant des personnes soupçonnées de participer au blanchiment des fausses amendes payées par les victimes de ces escroqueries. En France, 18 suspects ont été interpellés cette semaine, principalement en région parisienne, mais aussi au Mans et dans la région lyonnaise. Ils sont poursuivis pour blanchiment et escroquerie en bande organisée. Une interpellation a également eu lieu en Belgique, le tout pour un préjudice estimé à plus de 3,3 millions d’euros.

Un nombre de victimes difficile à établir

Selon le parquet, le circuit fonctionnait en deux étapes : des premières personnes ouvraient des comptes bancaires en France qui servaient à recevoir les fonds déposés par les victimes, puis des « collecteurs » prenaient le contrôle de ces comptes et faisaient la liaison avec les escrocs, soupçonnés d’opérer notamment depuis la Côte d’Ivoire.

L’enquête ayant permis ces interpellations a été confiée, en France, à l’Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication (OCLCTIC) de la police judiciaire, au centre de lutte contre les criminalités numériques de la gendarmerie, à la brigade de recherche de Nice et la section de recherche de Versailles. Elle est également coordonnée au niveau européen par Europol et Eurojust, avec la coopération des autorités italiennes et roumaines.

L’ampleur de ce type d’escroquerie est difficile à estimer avec précision tant le mode opératoire, aujourd’hui très répandu et que les enquêteurs soupçonnent d’être utilisé par de nombreux arnaqueurs ou groupes d’arnaqueurs indépendants, est massif. « Ce sont des réseaux qui font de l’escroquerie à la fausse convocation, mais aussi d’autres types d’escroqueries, comme le “romance scam” », qui consiste à séduire en ligne une victime pour lui extorquer de l’argent, souligne Sophie Gschwind, magistrate au sein de la section cyber (J3) du parquet de Paris. Surtout, le modèle n’est pas limité à la France puisque des signalements ont également eu lieu dans plusieurs pays européens, dont la Roumanie, mais aussi au Canada.

En juin 2022, on recensait en France plus de 150 000 signalement faits à la plate-forme Pharos et plus de 300 dépots de plainte pour des arnaques à la fausse convocation, mais le nombre réel de victimes reste inconnu. Les autorités ont, dès l’explosion de ce mode opératoire, fortement communiqué pour alerter les potentielles victimes, car les dégâts psychologiques peuvent être très graves pour les personnes ciblées : six enquêtes sont ouvertes sur des personnes s’étant suicidées, potentiellement après avoir fait l’objet de ce type d’escroquerie.

Les autorités françaises répètent que les enquêteurs judiciaires n’envoient jamais de telles convocations par e-mail, et proposent encore moins d’abandonner des poursuites en échange de soi-disant « amendes. » Si l’on est concerné par ce type d’arnaque, il est conseillé de ne pas répondre au message et de le signaler sur la plate-forme Cybermalveillance, ainsi que de porter plainte.

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