un pamphlet contre la plate-forme numérique

un pamphlet contre la plate-forme numérique


Livre. Lors de la récente cérémonie des Emmys, les trophées de la télévision américaine, il était de bon ton de brocarder Netflix. Ces derniers mois, la plate-forme de streaming fondée par Reed Hastings a perdu des abonnés, licencié des employés et restreint ses investissements dans la production. Le court pamphlet que Romain Blondeau, naguère journaliste, aujourd’hui producteur, adresse à la plate-forme – Netflix, l’aliénation en série – semble arriver un peu tard. Mais Netflix compte toujours plus de 200 millions d’abonnés dans le monde, dont une dizaine de millions en France, qui passent des siècles et des siècles à consommer ses contenus (on ne dit plus programmes), puisque c’est désormais ainsi – en additionnant les minutes passées devant les écrans par chaque consommateur (on ne dit plus spectateur) – qu’on comptabilise le succès ou l’échec.

Romain Blondeau retrace brièvement l’évolution de la société, dont la raison d’être était initialement d’irriguer les déserts cinématographiques américains en proposant aux spectateurs privés de salles la location de DVD qu’ils recevaient par la poste. En 2007, la firme propose une première version de son site de vidéo à la demande sur abonnement. Six ans plus tard, elle se lance dans la production de contenus originaux avec les séries Orange Is the New Black et House of Cards. En 2012, la firme a entrepris une campagne de développement international qui lui permet aujourd’hui d’être présente dans le monde entier, à l’exception de la Chine, de la Corée du Nord, de la Syrie et – depuis l’invasion de l’Ukraine – de la Russie.

Considérations mercantiles

L’argument central du texte de Blondeau tient à la mise en parallèle de l’emprise croissante de Netflix sur la création et la consommation de fictions en images (séries et longs-métrages) et le triomphe des thèses économiques défendues par Emmanuel Macron. Pour l’auteur, Reed Hastings et le président français sont des jumeaux idéologiques, « fans de la destruction créatrice ». Selon lui, c’est grâce à cette proximité que Netflix a pu déborder les défenses naturelles que lui opposait l’organisation du financement du cinéma et de l’audiovisuel français, réussissant même à en devenir le bénéficiaire.

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Romain Blondeau ne veut rien entendre de la part des défenseurs des communautés virtuelles qui se créent autour des séries. Il n’accorde pas plus de crédit à l’implication de Netflix dans la vie publique américaine, attribuant aussi bien le colorblind casting (distribution des rôles oublieuse de l’appartenance ethnique des interprètes) de la série La Chronique des Bridgerton que la diffusion de 13th, documentaire militant d’Ava DuVernay, à des considérations mercantiles. Comme toutes les saintes colères, la sienne est parfois injuste. Il n’empêche : pour l’instant, les seules forces capables d’arrêter Netflix ne relèvent pas du sursaut de la politique culturelle que l’auteur appelle de ses vœux. Ce sont celles dont disposent ses concurrents, Disney, Warner Discovery, Apple ou Amazon.

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