Comment parler de pornographie avec son enfant… dès ses 8 ans

Comment parler de pornographie avec son enfant… dès ses 8 ans


C’est une discussion que nous n’avons pas eue avec nos parents. Vers 4-5 ans, ils nous avaient vaguement expliqué « comment on fait les bébés » (« la petite graine qui va dans l’œuf »). Puis, les hormones explosant, pour les plus chanceux d’entre nous, papa ou maman avait un jour débarqué dans la chambre, l’air faussement décontracté, pour s’assurer, justement, qu’on évite de faire des bébés et d’attraper des MST (« tu sors couvert ! »).

Désormais, une étape supplémentaire, gênante mais nécessaire, paraît s’imposer : la conversation porno. Et mieux vaut commencer tôt. Car les gamins qui regardent ces films pour adultes, comme ceux qui harcèlent leurs camarades ou se droguent en cachette, ne sont pas que « les enfants des autres ».

Quelques chiffres pour se donner de l’élan : à 12 ans, un enfant sur trois a déjà été exposé à des images pornographiques ; pour les moins de 18 ans, cette proportion grimpe à 82 %, selon un sondage OpinionWay pour 20 Minutes publié en 2018. Une autre étude, réalisée en 2020 par le même institut pour la région Ile-de-France, établissait à 10 ans l’âge moyen de la première exposition à ce type de contenu. Parmi les 27 % des moins de 17 ans qui consomment du porno régulièrement, 91 % utilisent leur smartphone. Et plus les jeunes sont issus d’un milieu défavorisé plus ils sont exposés à l’addiction, selon une enquête Ipsos réalisée en 2018 auprès des 14-24 ans.

Erika Lust, réalisatrice et productrice de films X éthiques et féministes, a lancé, en 2017, The Porn Conversation, un site Internet proposant, en anglais, des outils pédagogiques aux parents et aux enseignants pour aborder les questions de sexualité et le rapport à la pornographie. Le 21 mars, elle présentait, lors d’une conférence à Paris, la version française de sa plate-forme et de ses « guides conversationnels » élaborés avec des sexologues et classés par tranches d’âge (8-11, 12-15, 16 et plus). « Avant, le porno était réservé aux adultes. Aujourd’hui, avec la multiplication des écrans, les enfants tombent sur ces contenus, il faut donc en parler avec eux », déclarait, en introduction, la cinéaste suédoise, qui figurait parmi les cent femmes les plus influentes dans le classement 2019 de la BBC. « On me demande souvent, concernant mon métier : as-tu dit la vérité à tes enfants ? Comme si j’étais Pablo Escobar… », plaisante celle qui a, depuis longtemps, ouvertement parlé de son activité à ses filles, Lara (16 ans) et Liv (12 ans).

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Un apéro avec Erika Lust : « Je veux rendre la sexualité féminine positive »

Les films d’Erika Lust sont, de fait, très éloignés de ce que propose la majorité du porno gratuit en ligne (88 % des images sont violentes, révélait un rapport du Sénat en 2022). Il suffit de lire les titres sur Pornhub ou YouPorn (« Ado qui se fait démonter ») pour comprendre qu’on est loin de la VHS qu’on avait piquée dans la bibli du paternel. Promotion du viol, de l’inceste, du racisme, objectivation des femmes, sexualisation des mineurs, banalisation de la violence… « Les messages nuisibles véhiculés par le porno ont un impact sur l’imaginaire de nos enfants, sur leur représentation du monde et leurs pratiques sexuelles futures », avertit la réalisatrice, qui plaide pour une éducation à la « culture pornographique » à l’école, similaire à ce qui existe pour l’éducation aux médias.

Il vous reste 69.14% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.



Source link

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.