le roi des appareils à focale fixe revient plus défini, plus performant… et plus cher

Leica Q3


Leica lance aujourd’hui le Q3 et cela pourrait être à nouveau une fabuleuse nouvelle pour les photographes amoureux des boîtiers experts à focale fixe. Un boîtier qui nous enthousiasme d’avance grâce au souvenir que nous a laissé son prédécesseur, le Q2. Parmi les appareils photo qui ne laissent pas de marbre, le Leica Q2 s’était imposé à nous comme un « joyau » photographique en 2019. Après une création de la gamme (et du format) avec le Q1 en 2015, le Q2 avait sublimé la stratégie numérique de Leica. Mettant dans les mains de ceux qui pouvaient se l’offrir un excellent compromis entre l’approche simple et épurée qu’incarne la marque (focale fixe, design intemporel, etc.) et une électronique en pointe. Un appareil bien plus facile à dompter qu’un complexe télémètre et sa mise au point manuelle.

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Le Q3 reprend le design et la couverture angulaire – un 28 mm f/1.7 – qui ont fait le succès des deux premiers modèles. Mais sous le capot aux allures si similaires en façade, Leica a fait une belle mise à jour électronique… et un peu de mécanique aussi. Le tout, en conservant les forces originales de son produit.

Nouveau capteur 60 Mpix

Passé de 24 Mpix (Q1) à 47,3 Mpix (Q2), Leica est monté de manière un peu plus modérée pour ce nouveau modèle avec un passage à un capteur plein format (dit aussi 24×36 mm) bardé de 60 Mpix. Un saut de définition de quasiment 30% qui a un impact sur les options de recadrage comme nous le verrons. Cette définition de 60 Mpix n’est pas innocente puisqu’elle est semblable à celle du Leica M11. De là à affirmer qu’il s’agit du même capteur, il n’y a qu’un pas que nous ne ferons pas à cause d’un progrès majeur en matière d’autofocus absent du M11 (lire plus bas, « Un coup de boost dans l’autofocus »).

Ce capteur de 60 Mpix est capable de livrer, comme le M11, des clichés dans sa définition native (9 520 x 6 336 pix), mais aussi dans deux modes plus réduits. A savoir un mode 36,5 Mpix (7 404 x 4 928 pix) ou 18 Mpix (5 288 x 3 518 pix). Loin d’être anecdotiques, ces deux modes de combinaison de pixels permettront aux photographes de garder de la place sur la carte mémoire, d’améliorer la vitesse en rafale, voire de renforcer le piqué des images en plus basse définition.

L’échantillonnage natif des couleurs se fait en 14 bits pour les RAW DNG, ce qui plaira aux amateurs de travail des plages dynamiques. De manière assez surprenante, le Q3 ne prend pas en charge le format compressé HEIF en 12 bits, mais de simples Jpeg 8 bits. En 2023 pour un produit « certifié pour iPhone et iPad », cela fait un peu tâche pour qui voudrait partager rapidement des fichiers compressés. Le passage vers un logiciel de développement RAW sera donc obligé pour profiter (et faire profiter) de la quintessence d’un tel capteur.

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La définition de 60 Mpix apporte avec elle un nouveau recadrage. Aux modes « traditionnels » de 35 mm, 50 mm et 75 mm qui profitaient au Q2, Leica ajoute un « zoom » dans l’image poussant jusqu’à un équivalent 90 mm. Attention ici : il s’agit d’un recadrage qui peut (sacrément) rogner la définition d’image, surtout à 90 mm. De plus, puisqu’il s’agit d’un recadrage, vous conservez le rendu des perspectives d’un 28 mm et ne profiterez donc pas de cette compression des plans que l’on commence déjà à bien sentir à 75 mm. Ce recadrage logiciel doit être compris comme un outil pour éliminer des éléments gênants sur votre image afin de respecter ce que votre veut cadrer. Mais sans profiter des caractéristiques réelles des optiques cibles.

La même optique que les deux modèles précédents ?

Le communiqué de Leica parle du Leica Summilux 28mm f/1,7 ASPH comme d’un « chef-d’œuvre optique », sans préciser s’il s’agit d’un nouveau modèle. Ce qui pourrait parfaitement être le cas : la couverture angulaire est la même (28 mm), de même que l’ouverture (f/1.7), la structure des lentilles (11 éléments en 9 groupes avec trois lentilles asphériques), une stabilisation optique et un mode de proxiphotographie (pompeusement appelé Macro) à seulement 17 cm. Pour avoir testé le Q1 et le Q2, il faut rappeler que les optiques (a priori similaires) offraient un rendu « macro » assez saisissant, avec un arrière-plan extraflou dans ce mode.

Le saut de définition de 24 Mpix à 47 Mpix, puis, ici, 60 Mpix pourrait laisser penser que Leica a été obligé de procéder à des ajustements de qualité de verre ou de traitement de surface pour presque tripler la définition d’image en bout de parcours. De manière assez paradoxale, s’il s’avérait que l’optique du Q3 soit vraiment la même que celle du Q1 original, alors oui, elle mériterait bien son étiquette de « chef-d’œuvre » !

Nouveau viseur, mécanique conservée… et améliorée

viseur Leica Q3
Le viseur OLED du Leica Q3 offre une confortable définition de 5,76 Mpix.

Leica a fait de son Leica Q3 un clone de ses frères tant sur le plan du design que de la prise en main. On note cependant un passage à un nouveau viseur OLED de 5,76 Mpix (contre 3,68 Mpix dans le Q2) qui devrait encore améliorer la qualité perçue – espérons que Leica a choisi un composant avec une bonne plage dynamique.

Ce nouveau viseur est complété par un écran arrière qui porte en lui deux nouveautés : sa définition d’image passe de 1,04 Mpix à 1,8 Mpix – mais il reste tactile et au format 3’’ au ratio 3/2. Cependant, il est désormais orientable pour faciliter les cadrages à bout de bras en hauteur, au niveau du ventre ou au ras du sol. Cette amélioration mécanique s’effectue dans un boîtier qui reste fidèle à sa conception originale, à savoir un châssis en fonte de magnésium qui est certifié IP52. C’est-à-dire que le boîtier est garni de joints qui le protègent en partie des poussières et de jets d’eau n’excédent pas un angle de 15° par rapport à la verticale – on oubliera donc les pluies battantes avec l’eau qui fouette l’appareil.

Un coup de boost dans l’autofocus

Codéveloppé avec Panasonic, le Q3 profite d’un récent virage technologique récemment amorcé par le constructeur japonais : l’introduction de l’autofocus à détection de phase. Comme pour le S5 II lancé en janvier dernier, le Leica Q3 ajoute donc cette technologie très adaptée aux sujets mobiles, notamment à la détection de contraste de Panasonic, le DFD. Une « super » détection de contraste que le Japonais avait été contraint de pousser dans ses retranchements pour tenter d’approcher les AF hybrides (contraste + phase) des autres constructeurs.

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L’arrivée d’un AF aussi moderne dans le Q3 est une excellente nouvelle pour les photographes de rue qui recherchent l’instantanéité que peu procurer une visée télémétrique (bien maîtrisée !) à la Leica M sur un boîtier dépourvu de télémètre. L’inconnu étant le comportement du capteur de 60 Mpix, un composant sans doute parent (le même ?) que celui du M11, un boîtier à mise au point manuelle ou les technologies d’autofocus n’ont pas leur place.

Au passage, il est bon de rappeler que, pour l’heure, Leica n’a pas fait de commentaires sur son fournisseur de capteur. Ce qui nous permet d’affirmer que Leica profite ici du savoir-faire de Panasonic, de leur partenariat technologique de longue date, et que le simple fait d’acheter un capteur (à Sony, par exemple) ne permet pas le maîtriser du jour au lendemain : les algorithmes logiciels sont capitaux. La bascule de Panasonic – qui devrait profiter au Micro 4/3 après avoir commencé dans un appareil à capteur plein format – précède de manière troublante celle de Leica…

De la 8K cinéma au menu

Mis à part les deux emplacements pour la batterie et l’unique carte SD UHS-II, les deux seules prises sont une Micro HDMI (compatible avec un enregistreur vidéo externe pour la vidéo 4K) et un USB-C 3.2. © Leica

Après avoir expérimenté la vidéo dans ses boîtiers M, Leica a depuis retiré la fonction qu’elle réserve aux SL et autres CL. Avec son ADN bien plus électronique qu’un M, il était logique que le Q3 profite lui aussi d’un mode vidéo. Et avec un capteur de 60 Mpix, Leica avait de quoi intégrer la vidéo, ce d’autant plus que l’entreprise peut s’appuyer sur le savoir-faire de Panasonic et celui qu’elle a acquis au travers de ses SL/SL2 et de sa division d’optiques de cinéma.

Si le Q3 propose une pléthore de modes vidéo allant de la Full HD classique ou ralentie, à la 4K cinéma propre (C4K à 600 Mbit/s mode All-I), c’est évidemment le mode 8K Cinéma qui appâte. Ce d’autant plus qu’il s’agit du mode vidéo le plus moderne : uniquement disponible sur carte SD (prévoyez une carte ultra-rapide à 300 Mbit/s garantis !), l’encodage se fait jusqu’en h.265 4:2:2 10 bit.

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C’est cependant en 4K Cinéma (C4K) que l’appareil devrait être le plus à l’aise, puisqu’il monte jusqu’à 60 images par secondes. Mais surtout, dans ce mode, il offre des trames entières non reliées en groupes d’image (GOP), un mode de compression appelé « All-Intra », qui facilite la précision des montages vidéo a posteriori. De plus, seuls les modes 4K permettent d’utiliser un enregistreur externe pour monter jusqu’à 600 mbit/s. Cela étant, s’il faut saluer tout outil technologique intégré comme de bons modes vidéo, le Q3 n’est pas une caméra championne de la vidéo, avec sa limite à 29 minutes 59 s d’enregistrement.

Inflation des prix qui fait s’éloigner le rêve

Le premier Q1 lancé en 2015 s’affichait déjà au tarif impressionnant de 4 000 €. Quatre ans plus tard, Leica avait bien contenu le prix à 4 790 € (+20%) pour un Q2 que nous avions trouvé réellement exceptionnel. Quatre années tard à nouveau, les coûts des technologies, l’inflation et autres facteurs font passer ce Q3 à 5 950 € – une manière polie de dire 6 000 €. Un tarif que le Leica Q2 atteint presque : lancé à 4 790 €, le Q2 a subit plusieurs hausses, portant son tarif à 5 650 € en ce mois de mai 2023 ! La hausse de prix générationnelle de 25% au lancement est donc réduite à quasiment rien si on prend en compte le prix du Q2 quatre ans après sa sortie.

Ce qui ne nous empêche pas de déplorer cette inflation massive. À leur lancement, les deux premières itérations de Q, quoi que chères (on est chez Leica, les amis), étaient encore dans le domaine du rêve atteignable. Et surtout, le Q2 avait prouvé à quel point ce format d’appareil à focale fixe pouvait, avec son côté très simple « vise et shoote », permettre de profiter d’une expérience épurée et d’une qualité d’image à la Leica, sans avoir à dépasser les 10 000 € d’investissement (un M11 coûte 8 750 € à lui tout seul…).

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Il ne s’agit pas ici de pointer Leica du doigt cette fois-ci. Si l’Allemand est coutumier de hausse de prix importantes, le Q3 n’est aujourd’hui qu’à 200 € de plus que le Q2 en fin de vie. Mais cela fait désormais 3 à 4 ans que les tarifs des équipements photo s’envolent chez presque tous les constructeurs. Le Q3 est donc un appareil cher qui fera rêver les foules – et les journalistes photo. Mais il faudra une bonne motivation et un bon budget personnel pour se l’offrir. Leica dispose cependant d’une pirouette : conserver le Q2 au catalogue en baissant notamment son prix. Une stratégie de maintien de gamme qui a du sens : avec ses RX100 et ses Alpha A7, Sony a prouvé que les vieux pots photographiques font toujours de belles images.

Si vous avez la passion de la photographie, l’amour des appareils photo (potentiellement) « simples » à focale fixe et un compte en banque aux réserves adéquates, le Leica Q3 peut être vôtre dès aujourd’hui pour 5 950 €.



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