La police amricaine serait devenue l’un des plus gros clients des entreprises de la Silicon Valley dveloppant des outils de surveillance. Les rapports signalent que les forces de l’ordre amricaines dploient de plus en plus des technologies d’espionnage tels que les drones-espions. Une nouvelle enqute de la Northwestern Pritzker School of Law estime qu’environ un quart des services de police les utilisent aujourd’hui. Les entreprises technologiques qui fournissent ces dispositifs de surveillance seraient finances par des socits de capital-risque mondialement connues. Les experts tirent la sonnette d’alarme sur la monte en puissance de la surveillance gouvernementale.
La vente l’tat prend de l’ampleur parmi les entreprises et les startups technologiques de la Silicon Valley. Elles vendent davantage d’quipements de renseignement, de surveillance et d’espionnage l’arme et aux forces de l’ordre. Une situation qui, selon les analystes et les groupes de dfense des droits de l’homme, renforce le contrle des tats et du gouvernement fdral amricains sur les populations. Ces quipements incluent des drones de surveillances dots d’une IA, des robots autonomes patrouilleurs, des programmes de reconnaissance faciale, etc. Bref, l’arme et la police amricaines sont devenues des clients incontournables de la Silicon Valley.
Selon les analystes, cela peut sembler trange que la Silicon Valley aide les forces de l’ordre amricaines espionner les fauteurs de troubles. Soutenir la surveillance de l’tat s’accorde mal avec les valeurs libertaires dfendues par plusieurs sommits amricaines de la technologie qui ont grandi dans les premiers jours de l’Internet. Bien que la Silicon Valley ait commenc par fournir des puces l’industrie militaire amricaine dans les annes 1950, ses relations avec l’tat se sont dtriores au fur et mesure que son attention passait des missiles autoguids au commerce lectronique et aux iPhone. Mais les choses semblent avoir pris une autre tournure.
Par exemple, parmi les fournisseurs de la police de New York figure Skydio, une entreprise de la Silicon Valley qui utilise l’IA pour rendre les drones faciles piloter et permettre aux policiers de les contrler avec trs peu de formation. Skydio est soutenue par Andreessen Horowitz, un gant du capital-risque, et par Accel, l’un de ses pairs. La police de New York achte galement Brinc, un fabricant de drones quips de camras de vision nocturne capables de voir travers les vitres des fentres. Parmi les investisseurs de Brinc, on trouve Sam Altman, PDG d’OpenAI, la startup l’origine de ChatGPT, et Index Ventures, une grosse socit de capital-risque.
Les analystes tentent d’expliquer cette nouvelle tendance par le fait que l’industrie technologique cherche de nouvelles frontires de croissance. En effet, les entreprises font face de nombreux dfis macroconomiques depuis quelques annes, une situation fortement exacerbe par la dernire crise sanitaire. Les pouvoirs publics sont les derniers survivants de la rvolution logicielle , a expliqu Katherine Boyle, associe gnrale chez Andreessen Horowitz, dans un billet de blogue publi l’anne dernire. Chez Andreessen Horowitz, Boyle est charge d’investir dans des entreprises qui promeuvent le dynamisme amricain, y compris la scurit nationale.
Au dbut de l’anne, Andreessen Horowitz a lanc un fonds appel « American Dynamism » dans le but d’investir dans les industries lies au gouvernement. Toutefois, la rsurgence de la vente l’tat n’implique pas seulement les startups ; les Big Tech rivalisent aussi pour dcrocher des contrats lucratifs avec le gouvernement fdral. Fin 2022, le Pentagone a rparti un contrat de 9 milliards de dollars pour la fourniture de services cloud Alphabet, Amazon, Oracle et Microsoft. Selon un rapport de The Economist, en 2022, 11 % de la valeur des contrats fdraux attribus aux entreprises concernaient des logiciels et des technologies, contre 8 % il y a dix ans.
Le rapport souligne que la surveillance est une activit gouvernementale en cours de modernisation. Les fournisseurs traditionnels tels qu’Axon Enterprise et Motorola Solutions sont rejoints par des startups qui proposent des technologies plus sophistiques. La premire d’entre elles est le drone. Ce secteur est domin par Dji, un fabricant chinois qui a fourni l’anne dernire prs des trois quarts de tous les drones vendus aux tats-Unis. Mais cela pourrait changer, car des restrictions ont t mises en place pour limiter les importations de certains quipements chinois vers les tats-Unis en raison de proccupations en matire de scurit nationale.
Tout cela constitue une aubaine pour des entreprises comme Skydio et Brinc. D’autres types de dispositifs d’espionnage ariens sont galement en cours d’laboration. La startup Skydweller dveloppe un avion autonome fonctionnant l’nergie solaire. S’il fonctionne, il n’aura pas besoin d’atterrir pour se recharger. Selon l’entreprise, cela permettrait « une surveillance persistante ». En plus, les satellites constituent une deuxime technologie en plein essor. SpaceX, la socit de fuses d’Elon Musk, et ses imitateurs, dont Blue Origne et OneWeb, ont contribu rduire le prix de l’envoi d’objets dans l’espace environ un dixime de ce qu’il tait il y a vingt ans.
L’orbite terrestre basse s’est ainsi couverte de satellites, dont, selon le rapport, environ un huitime sert l’observation de la plante. La socit de donne PitchBook estime qu’il y a aujourd’hui prs de 200 entreprises qui vendent des images satellitaires. BlackSky, l’une des entreprises qui vendent des images satellitaires, affirme pouvoir prendre une image d’un point de la Terre toutes les heures environ. Le rapport indique que l’imagerie satellitaire a beaucoup volu au cours des dix dernires annes, depuis que la police de l’Oregon a utilis des images de Google Earth pour dcouvrir une culture illgale de marijuana dans l’arrire-cour d’un habitant.
Par ailleurs, les entreprises technologiques vendent galement des outils pour aider les forces de l’ordre mieux utiliser la profusion d’images et d’informations qu’elles ont dsormais porte de main. Ambient.ai, une autre startup soutenue par Andreessen Horowitz, a mis au point une technologie qui surveille automatiquement les camras la recherche d’activits suspectes. Palantir, une socit d’exploration de donnes qui s’est injecte dans le complexe militaro-industriel amricain, vend ses outils des services tels que la police de Los Angeles. Enfin, les logiciels de reconnaissance faciale seraient dsormais plus largement utiliss aux tats-Unis.
Un dixime environ des forces de police amricaines auraient accs cette technologie. Un rapport publi en septembre par le « Government Accountability Office » des tats-Unis a rvl que six organismes fdraux chargs de l’application de la loi, dont le FBI et les services secrets, effectuaient ensemble en moyenne 69 recherches par reconnaissance faciale chaque jour. Parmi les principaux fournisseurs cits figurait Clearview AI, une entreprise soutenue par Peter Thiel, cofondateur de PayPal et investisseur en capital-risque. Les analystes estiment que les capacits de surveillance et d’espionnage pourraient bientt tre renforces par l’IA gnrative.
Will Marshall, patron de Planet Labs, une entreprise spcialise dans les satellites, explique que « l’analyse d’images satellites l’aide de cette technologie permettra de rechercher des objets sur la Terre, tout comme Google permet de rechercher des informations sur le Web ». Cela devrait permettre aux entreprises d’engranger encore plus de bnfices au dtriment de la vie prive des Amricains. Fusus, une startup qui vend des logiciels de surveillance de la criminalit en temps rel, affirme que ses ventes aux forces de l’ordre amricaines – il y aurait plus 18 000 services de police aux tats-Unis – ont augment de plus de 300 % l’anne dernire.
En 2017, la startup Flock Safety a lanc un lecteur de plaques d’immatriculation qui serait dsormais utilis dans au moins 47 tats amricains. D’aprs Paul Kwan de General Catalyst, une autre socit de capital-risque, les relations avec les acheteurs gouvernementaux, une fois tablies, ont tendance tre durables. Cela se fait en dpit des critiques et des appels l’arrt des livraisons de technologies avances de surveillance aux forces de l’ordre et aux gouvernements. Ces appels ont trouv un cho chez certaines entreprises. Ainsi, en 2020, Amazon, Microsoft et IBM ont renonc fournir des services de reconnaissance faciale aux forces de l’ordre.
Les entreprises ont voqu des proccupations lies la protection de la vie prive. Cependant, les analystes estiment que la vente de technologies de surveillance est lucrative et devrait donc persister, voire s’accentuer l’avenir. Cette tendance devrait s’observer aux tats-Unis, en Europe et ailleurs dans le monde. Par exemple, en France, le gouvernement souhaite exprimenter grande chelle des camras de surveillance dotes d’IA lors des JO de Paris en 2024 pour dtecter en temps rel les comportements suspects. Cependant, la proposition a suscit un toll, les critiques craignant que les camras restent aprs les Jeux olympiques de 2024.
L’entreprise sudoise SmartEye vend une technologie de suivi des yeux pour surveiller l’humeur des pilotes. SmartEye vend galement ses produits des agences de publicit. Les fonds spculatifs utilisent l’imagerie satellitaire pour compter les voitures dans les parkings des dtaillants, dans l’espoir d’valuer leurs revenus avant la publication des informations sur le march. La tendance au renforcement de la surveillance, qu’elle soit le fait de Big Brother ou des grandes entreprises, ne semble pas prs de s’inverser , indique le rapport.
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Selon vous, pourquoi de plus en plus d’entreprises et de startups vendent des technologies de surveillance ?
L’utilisation des technologies de surveillance et d’espionnage est-elle justifie ? Si oui, dans quelles conditions ?
Quelles sont les proccupations que pose l’utilisation de ces technologies ?
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