Pourquoi Netflix lorgne maintenant les jeux vidéo

Pourquoi Netflix lorgne maintenant les jeux vidéo


En 2017, Netflix sortait sa première expérience interactive avec L’Epopée du chat potté, prisonnier d’un conte. Contrairement aux traditionnels films et séries de la plate-forme de vidéos à la demande, l’action s’arrêtait régulièrement pour proposer au spectateur une alternative : par exemple, le héros félin doit-il serrer la patte d’un autre personnage ou l’embrasser ? Opter pour l’une ou l’autre des propositions à l’aide de la télécommande influait ensuite sur le cours de l’histoire. Un format hybride ensuite repris en 2018 avec Bandersnatch, un épisode de la série Black Mirror, et Minecraft : Story Mode, inspiré de Minecraft, le jeu vidéo le plus vendu au monde.

Cinq ans plus tard, ces « films dont vous êtes le héros » ne sont plus d’actualité, mais Netflix lorgne toujours avec gourmandise la dynamique industrie vidéoludique – rien qu’en France, elle a généré 5,6 milliards d’euros en 2021, selon le Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs. La sortie, le 31 mai, d’Exploding Kittens témoigne de cette volonté de la plate-forme d’attirer de nouveaux abonnés avec le jeu vidéo.

Trouver de nouveaux abonnés

The Witcher, League of Legends, Ingress, Castlevania, Cuphead ou même DOTA… L’appétit du géant du streaming pour le jeu vidéo s’illustre déjà depuis un certain temps dans la multiplication des adaptations en séries exclusives. Et le mouvement n’est pas près de s’arrêter : une énième déclinaison de l’horrifique Resident Evil ainsi que des séries animées tirées de Cyberpunk 2077, Tomb Raider et Tekken ont récemment été annoncées.

Certes, Netflix n’a pas le monopole de l’adaptation de franchises vidéoludiques. Des projets similaires sont aussi en cours chez ses concurrents avec, par exemple, The Last of Us pour HBO ou Fallout pour Amazon Prime. Mais la firme sise à Los Gatos se distingue par son ambition de devenir une plate-forme de jeu, un projet officialisé en novembre 2021.

« Nous visons des titres qui suscitent des conversations, de l’enthousiasme et du buzz… Qui poussent les gens à s’abonner et, bien sûr, nous permettent de les retenir », expliquait le directeur produit de la firme, Greg Peters, durant la publication de son bilan financier du premier trimestre 2022, le 19 avril. Car trouver un nouveau souffle est plus que jamais la priorité pour Netflix. Concurrencée par de nouveaux acteurs, notamment Disney +, la plate-forme est aussi confrontée à de mauvais résultats : pour la première fois depuis dix ans, son nombre d’abonnés a baissé – 200 000 en moins par rapport au trimestre précédent.

Le jeu mobile en ligne de mire

Avec la sortie d’Exploding Kittens, une vingtaine d’applications sont maintenant téléchargeables depuis un smartphone ou une tablette connectée à un compte Netflix. Si vous n’avez jamais entendu parler de ces félins, il faut vous replonger dans la culture Web de 2015. Cette année-là, ce jeu de cartes, qui consiste à ne surtout pas piocher la carte du chaton explosif, battait les records de financement participatif en ligne, avec 8,7 millions de dollars (8,1 millions d’euros) récoltés.

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Netflix espère donc réveiller l’engouement pour ce titre humoristique destiné aux adultes avec une nouvelle adaptation pour smartphones et tablettes (une version précédente était déjà proposée sur iOS et Android depuis 2018). En parallèle de son élaboration, l’entreprise a aussi développé une série d’animation autour de l’univers d’Exploding Kittens, prévue pour 2023.

« C’est un premier pas sur une longue feuille de route que nous avons imaginée », a ainsi fait savoir Greg Peters lors du dernier bilan financier. Reste que cette « première » – formule qui relègue à l’arrière-plan le travail réalisé avec Bandersnatch ou les aventures vidéoludiques rétro dérivées de Stranger Things – est, pour le moment, un cas isolé. Aucun autre projet similaire de développement simultané de série et de jeu vidéo n’a été annoncé depuis.

Trois studios rachetés

Pour proposer des jeux vidéo originaux, Netflix a recruté des spécialistes du secteur, comme Mike Verdu, responsable jeux vidéo, anciennement responsable de la division de réalité virtuelle de Facebook et cadre chez Electronic Arts. La société souhaite également développer ses projets au sein de ses propres studios. Une première étape, dans ce sens, a été amorcée en septembre 2021 avec le rachat, pour un montant inconnu, de l’entreprise californienne Night School (Oxenfree) ; puis, en mars 2022, celui de deux studios spécialistes du mobile : le texan Boss Fight Studio (Dungeon Boss) et le finlandais Next Games (The Walking Dead : No Man’s Land).

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« Oxenfree II : Lost Signals » devrait sortir en 2022. Il ne sera pas disponible sur Netflix, malgré le rachat de Night School Studio.

Si l’on ignore le coût final des transactions, la taille des structures reste modeste quand on les compare à d’autres rachats récents ou en cours dans l’industrie vidéoludique. Microsoft, par exemple, est prêt à débourser près de 69 milliards de dollars pour le premier éditeur américain, Activision Blizzard, tandis que Take Two a mis sur la table plus de 12 milliards de dollars pour Zynga, acteur important du jeu mobile. Reed Hastings, le cofondateur et président de Netflix, est malgré tout confiant : « Franchement, nous sommes en train de renforcer nos capacités, plus rapidement encore que lorsque nous intégrions le marché du cinéma. »

Avec une différence notable : l’intrusion de Netflix dans le jeu vidéo se fait surtout avec des expériences aux formules classiques, destinées aux joueurs occasionnels, comme les drôles de terrains de minigolf dans Wonderputt Forever ou les grilles chatoyantes similaires à celles de Candy Crush dans Knittens. Pas question, pour le moment, donc d’offrir d’éblouissants blockbusters aux budgets hollywoodiens, tels que ceux de la série The Crown ou The Irishman, le dernier film de Martin Scorsese.





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