Quand la légende devient une légende urbaine

Quand la légende devient une légende urbaine


Sonya Lwu est une Youtubeuse à succès américaine, qui a écrit un livre sur le Cecil Hotel. Sobrement intitulé « la malédiction du Cecil Hotel », elle nous plonge dans la véritable histoire de cet établissement.

La toile s’enflamme

Les habitants de Los Angeles connaissent plus ou moins de nom ou de réputation le Cecil Hotel, qui se trouve dans un quartier particulièrement mal famé de la ville. Y circulent des toxicomanes, des receleurs, des prostituées, des voleurs, des sans-abris, bref, tous les rejetons indésirables de la mégalopole. Au milieu trône le Cecil Hotel dont le hall d’entrée ne permet pas de percevoir, de prime abord, le côté macabre de l’établissement.

Si, aujourd’hui, tout le monde connaît cet hôtel, c’est pour deux raisons. La première est le décès dans cet établissement d’Elisa Lam, une étudiante canadienne et la seconde est son apparition dans American Horror Story.

Elisa Lam est une étudiante en promenade aux États-Unis. Elle loge au Cecil Hotel et disparaît brutalement une nuit. On la retrouve quelque temps plus tard dans le réservoir d’eau sur le toit de l’hôtel. La police de Los Angeles est dépassée par ce décès et décide de rendre publique une vidéo, où Elisa Lam est filmée, quelques minutes avant son décès.

À partir de là, la toile s’enflamme et des centaines de détectives amateurs vont s’emparer de ce cas, pour essayer de le résoudre. Point troublant, qui alimente la légende noire du Cecil Hotel : Elisa Lam est décédée de la même façon que dans un film d’horreur — Dark Water — et découverte pour les mêmes raisons que dans le film. Pendant des semaines, des théories complotistes vont fleurir sur le Web pour expliquer le décès de la jeune Canadienne.

Quant à American Horror Story, les créateurs de la série n’ont pas caché qu’ils se sont grandement inspirés de l’établissement pour le chapitre « Hotel », poussant le vice jusqu’à inclure Richard Ramirez, qui a réellement séjourné dans l’hôtel, mais aussi en intégrant certains éléments de l’histoire de l’établissement. Il n’en fallait pas plus pour que la légende du Cecil Hotel dépasse le seul cadre de Los Angeles.

Des morts explicables

L’auteur indique que l’établissement connaît un grand nombre de décès, aussi bien par overdose que par suicide. Pour les overdoses, il est situé dans Skid Row et ses tarifs permettent aux toxicomanes de se trouver un point de chute. Mais, qu’en est-il des suicides ? Les chambres du Cecil Hotel souffriraient-elles de la même malédiction que la chambre 1408 dont nous parlions dans une précédente chronique ?

L’explication est beaucoup plus rationnelle. Selon une étude parue en 2006, on se suicide beaucoup plus dans les hôtels que chez soi. Elle conclut même en disant que lorsque les clients sont des locaux, le risque de suicide est accru.
Une autre étude beaucoup plus récente, effectuée en 2019, arrive à la même conclusion. On se suicide beaucoup dans les hôtels et c’est presque un endroit privilégié pour se donner la mort, par rapport à son domicile. Entre-temps, une étude similaire a été menée sur le secteur de Las Vegas et si les résultats vont dans le même sens que l’étude de 2006 et de 2019, les raisons sont différentes.

La raison pour laquelle les suicidés préfèrent les hôtels est simple : ne pas être interrompu, ne pas être secouru et ne pas imposer à ses proches une vue qu’ils ne pourront pas oublier, tout en ayant la certitude que son corps sera découvert. Mais, cela n’épargne pas le personnel des hôtels et un fil Reddit est même consacré à ce sujet. Les études relèvent également que la majorité des suicidés sont des hommes, qui optent pour les armes à feu. Ce qui crée une sorte de discrimination entre les hôtels aux États-Unis. En effet, si les hôtels appartenant à des chaînes ont des procédures spécifiques et les moyens de faire appel à des nettoyeurs de scènes de crimes, ce n’est pas le cas des motels et des hôtels locaux. Quoi qu’il en soit, les morts du Cecil Hotel sont assez rationnelles.

Les rejetons de ce monde

Si on met de côté Elisa Lam, qu’est-ce qui a fait que le Cecil Hotel est devenu synonyme d’établissement de malheur ? En trois noms : Elizabeth Short, Richard Ramirez et Jack Unterweger.

La première est rentrée dans la culture populaire, à la suite de son assassinat assez brutal. Elle est plus connue sous le nom de Dahlia noir et pour une raison obscure, elle reste liée au Cecil Hotel, alors qu’elle a séjourné dans plusieurs endroits différents. Sonya Lwu revient sur son histoire de manière très intéressante et remet en perspectives les différentes théories quant à l’auteur de son assassinat. Notons au passage que les techniques d’investigation des journalistes de l’époque auraient de quoi faire bondir toutes les rédactions actuelles. Certains n’ont pas hésité à se présenter comme policiers pour obtenir des informations auprès des proches d’Elizabeth Short.

Si la présence d’Elizabeth Short au Cecil Hotel n’est pas avérée, ce n’est pas du tout le cas de l’un des plus célèbres tueurs en série américain, Richard Ramirez, lui aussi présent dans American Horror Story. Le Cecil Hotel a été un point de chute pour ce tueur halluciné, qui a manqué de se faire lyncher par une foule en colère.

Quant à Jack Unterweger, le Cecil Hotel a eu ses faveurs en raison de sa proximité avec des prostituées. Arrêté en Autriche à l’âge de 25 ans, il s’amende en prison, au point de susciter une ferveur populaire pour demander une libération anticipée. Elle sera refusée, mais il sortira après 15 ans de détention. Ayant acquis notoriété, respectabilité et moyens financiers, il s’envole pour Los Angeles et recommence à tuer des prostituées. Finalement arrêté, il est extradé et se suicide en prison.

Le livre de Sonya Lwu a le mérite de démêler le vrai de la légende, de revenir avec précision sur certains faits marquants et d’ajouter quelques informations peu connues du grand public. C’est un livre qui se lit très bien et avec plaisir. « La malédiction du Cecil Hotel » est disponible en ebook et au format papier.





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