Après un léger repli en 2022, le chiffre d’affaires du jeu vidéo en France établit un nouveau record. En 2023, la première industrie culturelle a généré dans le pays près de 6,1 milliards d’euros, soit une hausse de 9,9 % par rapport à l’année précédente, selon le bilan annuel du Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs (SELL), publié mercredi 20 mars.
« Cette performance remarquable, réalisée dans un contexte macroéconomique pourtant défavorable – en raison de la forte inflation – installe aujourd’hui la France comme un des marchés les plus dynamiques en Europe », estime James Rebours, président du SELL. L’engouement ne retombe pas après de fastes années 2020 et 2021 durant lesquelles, à cause de la pandémie de Covid-19, les Français ont beaucoup sollicité les jeux vidéo. Mais cette bonne nouvelle contraste aussi avec les annonces en série de milliers de licenciements dans l’industrie à l’échelle internationale.
En France, les consoles sont la locomotive du secteur vidéoludique. Le chiffre d’affaires de ce marché précis (jeux, consoles et accessoires confondus) est de plus de 3,1 milliards d’euros, soit une hausse de 24 % par rapport à 2022. Les ventes de consoles en elles mêmes ont connu une augmentation de 72 % en un an, pour plus d’un milliard d’euros de chiffre d’affaires. Un rattrapage peu surprenant, les années précédentes ayant été marquées par des pénuries de composants entraînant l’absence en rayon des consoles de nouvelle génération (Xbox Series et PlayStation 5).
Les applications de jeu mobile non plus ne connaissent pas la crise. Elles ont généré un chiffre d’affaires cumulé de presque 1,5 milliard d’euros, soit une hausse de 4,8 % par rapport à 2022. L’écosystème du jeu vidéo sur PC atteint, quant à lui, 1,4 milliard d’euros mais enregistre une baisse annuelle de 8,5 %.
Pelouse de stades ou plaine d’Hyrule
Pour la dixième année consécutive, la simulation de football d’Electronic Arts, EA Sports FC 24 (anciennement connue sous le nom de FIFA), est le champion du classement des ventes en France avec près d’1,5 million d’exemplaires écoulés. Il est suivi d’Hogwarts Legacy : l’Héritage de Poudlard (1,1 million d’unités), The Legend of Zelda : Tears of the Kingdom (plus de 970 000 unités) et Super Mario Bros. Wonder (plus de 750 000 unités).
Mais le nombre d’exemplaires vendus de ces deux derniers titres est sous-estimé. Car contrairement à ses concurrents, le fabricant japonais Nintendo ne communique pas les ventes dématérialisées de ses jeux. Or, sur console, les jeux entiers téléchargés – c’est-à-dire qui ne sont pas des extensions ou des jeux en ligne évolutifs – représentent 65 % des ventes (plus d’1,1 milliard d’euros en 2024).
La répartition entre les ventes physiques et dématérialisées ne pose en revanche aucun problème de calcul sur PC : les jeux en boîtes sont une espèce qui a presque disparu, 99 % des titres vendus pour ces machines sont téléchargés. Diablo IV s’installe en tête du classement 2023 des ventes sur ce secteur. Le titre de Blizzard cumule 314 000 unités vendues, contre plus de 186 000 pour Hogwarts Legacy, 145 000 pour Call of Duty : Modern Warfare III et plus de 115 000 pour Grand Theft Auto V, qui affiche une longévité hors norme, dix ans après sa sortie.
Le secret des ventes de « Baldur’s Gate III » gardé
Un titre brille toutefois par son absence dans ce classement : Baldur’s Gate III, de Larian Studios, qui a remporté la plupart des prix de meilleur jeu de l’année 2023 – le dernier en date étant le Pégase du meilleur jeu étranger, le 7 mars. Le studio belge à l’origine de ce jeu de rôle au succès phénoménal, dérivé du jeu de rôle Donjons & Dragons, n’a pas communiqué ses chiffres de ventes sur le territoire français. Ce qui n’a toutefois pas empêché le SELL de prendre en compte le chiffre d’affaires généré par ses ventes en France dans son calcul global.
De son côté, avec son modèle de jeux gratuits, le secteur du mobile n’affiche pas de véritable leader des ventes. Seules sont connues les applications de jeux les plus téléchargées : Monopoly Go en tête, suivie de Royal Match et de Roblox. Ce classement ne reflète pas pour autant les jeux les plus lucratifs – les éditeurs évitent pour le moment de communiquer sur les revenus tirés des microtransactions grâce auxquelles sont monétisés la majorité des titres sur smartphone.
Dans cette avalanche de bonnes nouvelles communiquées par les représentants de l’industrie, une contre-performance est notable : le jeu par abonnement (Game Pass de Microsoft, PlayStation Plus, Switch Online de Nintendo ou Ubisoft Connect) connaît un reflux significatif de près de 40 % sur console et PC. De tels abonnements n’ont toutefois qu’une part très réduite dans le chiffre d’affaires du secteur puisqu’ils n’en représentent que 1,6 %, soit environ 161 millions d’euros. Dans le jeu vidéo, la crainte de voir arriver un service d’abonnement à la puissance équivalente à celle de Netflix dans le secteur audiovisuel n’est pas encore d’actualité.